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C’est quoi, un réseau de neurones mécaniques ?

Cette matrice permettrait de construire des structures capables d’ “apprendre” à optimiser leur propre résistance.

Lorsqu’on parle de réseaux de neurones, la conversation tourne généralement autour du cerveau ou de l’intelligence artificielle. Mais une équipe de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) est en train d’explorer une nouvelle définition du concept : dans leur papier de recherche publié dans Science Robotics, ils décrivent une sorte de treillis mécanique capable d’« apprendre » et de modifier ses propriétés physiques en temps réel.

Ce concept, les chercheurs l’ont baptisé “réseau de neurones mécanique“. Comme son nom l’indique, l’idée est directement inspirée par les réseaux de neurones virtuels avec lesquels travaillent les chercheurs en IA. Ces derniers sont constitués de plusieurs couches de nœuds (les neurones) interconnectés. Ces systèmes évoluent au fil des itérations en changeant l’importance de chaque liaison (ou, plus précisément, le coefficient qui lui est associé).

C’est ce mode de fonctionnement qui permet aux systèmes basés sur l’IA d’« apprendre » pour optimiser le résultat final. Les chercheurs d’UCLA se sont donc demandé s’il était possible de faire de même avec une structure physique, pour qu’elle puisse adapter progressivement ses propriétés physiques à son environnement.

Un système solide, dynamique et extensible en apprentissage constant

Pour le vérifier, ils ont construit un prototype en deux dimensions. Dans cette structure, ce sont de gros pistons qui se chargent de relier les différents nœuds. Ils sont munis de capteurs qui permettent de déterminer l’intensité des contraintes en chaque point du système.

Un algorithme d’optimisation se charge de collecter l’ensemble de ces mesures. Il calcule ensuite la façon dont le système devrait réagir pour diminuer autant que possible les faiblesses structurelles. Une fois ces opérations effectués, la longueur de chaque piston est ajustée pour s’approcher au plus près de la configuration optimale. On se retrouve donc avec une structure dynamique qui peut se montrer exceptionnellement résistante dans toutes les situations.

Les auteurs donnent l’exemple d’une aile d’avion. Les ingénieurs en aéronautique travaillent avec des marges de sécurité énormes; en pratique, le risque de rupture est donc extrêmement faible. Mais si l’aile si elle se retrouve quand même confrontée à une bourrasque beaucoup plus puissante que prévu, elle ne pourrait pas s’adapter en temps réel pour y résister.

En revanche, une aile construite autour d’un réseau de neurones mécaniques de ce genre en serait capable. L’algorithme pourrait assouplir certaines connexions et en renforcer d’autres pour éviter une rupture complète – le tout en temps réel. En outre, au fil de ces ajustements, le système gardera ces contraintes en mémoire. Il pourra donc y répondre encore plus efficacement si la situation se présente à nouveau. Les chercheurs comparent ce comportement à la mémoire musculaire.

La structure est contrôlée par un réseau de neurones – virtuels, cette fois – qui répond en temps réel aux contraintes qui s’exercent sur la structure. © Lee et al.

Et la cerise sur le gâteau, c’est que ce réseau de neurones est avant tout un concept qui est défini par sa fonction ; il ne dépend pas d’un matériau en particulier. Il serait donc possible de construire une structure de ce genre avec des matériaux divers et variés, adaptés à des contextes particuliers. Dans le cadre de l’aéronautique, on peut par exemple imaginer une armature ultralégère en fibre de carbone.

Un concept prometteur, mais pas encore mature

Et après cinq ans d’efforts pour peaufiner les derniers détails, les derniers tests se sont avérés très concluants; leur prototype est désormais capable de répondre aux contraintes en temps réel. Ces travaux sont donc sur la bonne voie ; mais le concept est encore loin d’être prêt pour une application pratique. Sa principale limite, c’est que pour l’instant, il ne s’agit encore que d’une structure en deux dimensions.

Des simulations informatiques ont confirmé que le concept fonctionnerait aussi en 3D, mais tout devient exponentiellement plus complexe; pour y parvenir, les chercheurs vont devoir modifier considérablement l’architecture des nœuds. En l’état, ceux qui sont utilisés dans cette preuve de concept sont « beaucoup trop complexes » pour convenir dans cette situation. Il faudrait donc simplifier ces sous-unités pour laisser la place à de très nombreux câbles et ressorts.

De plus, cette transition va augmenter exponentiellement le temps de calcul nécessaire pour reconfigurer ce squelette dynamique ; une donnée dont il faudra impérativement tenir compte pour réagir en temps réel, comme dans l’aile d’avion citée en exemple ci-dessus.

Malgré tout, il sera intéressant d’observer l’évolution de cette technologie ; si les chercheurs atteignent leur but avec un réseau de neurones mécaniques 3D, il pourrait bien s’agir d’une première étape vers un grand changement de paradigme en ingénierie.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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