Lorsqu’on regarde des galaxies sur les photos rapportées par les diverses agences spatiales, on pourrait facilement croire que ces structures aux proportions astronomiques sont relativement figées ; mais si elles sont constituées d’objets eux-mêmes extrêmement massifs à la durée de vie bien supérieure à celle des humains, cela ne signifie pas qu’elles sont amorphes.
Loin de là ; ce sont des objets extrêmement dynamiques, même s’il est difficile d’appréhender ces phénomènes à notre échelle. Entre les forces gravitationnelles originaires des différents corps célestes, les réactions chimiques qui s’y déroulent et l’influence des autres objets du cosmos, il existe tout un tas facteurs extérieurs qui peuvent perturber la tranquillité de ces énormes objets.
Et notre bonne vieille Voie lactée ne fait pas exception. Elle présente même un phénomène assez curieux. Sur les photos, elle apparaît traditionnellement comme un joli disque bien plat et régulier, mais la réalité est très différente. En réalité, la partie centrale est secouée en permanence par des ondes de grande amplitude — un peu comme un étang où l’on aurait lâché une grosse pierre.
Un carambolage entre géants cosmiques
Et cette analogie n’est pas choisie au hasard. Elle correspond même étonnamment bien à la nouvelle théorie d’une équipe internationale de chercheurs ; ses membres expliquent avoir réussi à déterminer l’origine de ces oscillations qui restaient encore mystérieuses jusque-là. Ils suggèrent que le seul scénario qui permettrait d’obtenir ces ondulations implique le passage d’un objet massif — sauf qu’ici, la « pierre » en question était environ 400 millions de fois plus lourde que le Soleil !
Pour arriver à cette hypothèse, les chercheurs sont partis d’auteurs études centrées autour d’une hypothèse assez populaire parmi les spécialistes. En effet, la plupart des modèles cosmologiques acceptent le fait que notre galaxie aurait été mise en mouvement par les passages répétés d’une seconde galaxie naine, baptisée Sagittaire. En traversant la Voie lactée de part en part à toute vitesse, cette dernière se serait comportée comme le fameux rocher décrit ci-dessus ; ce sont ces impacts qui auraient donné naissance aux ondulations qu’on observe encore aujourd’hui.
Une hypothèse prometteuse, mais il y avait un hic : les modèles cosmologiques suggèrent que si cette galaxie naine avait ainsi traversé la nôtre, ces vibrations s’étendraient probablement jusqu’à sa frontière. Or, ce phénomène n’avait jamais été observé directement… jusqu’à présent.
De la « sismologie galactique » de haute volée
Les chercheurs se sont appuyés sur les relevés du satellite Gaia, un engin de l’ESA qui enregistre le mouvement de millions de corps célestes par rapport au centre de la Voie lactée. Il cherche ainsi à construire un gigantesque catalogue du cosmos. Tout récemment, ces données ont déjà permis à des astronomes de repérer le trou noir le plus proche de a Terre (voir notre article).
Dans ce cas précis, ils ont comparé les mouvements d’environ 20 millions d’étoiles réparties dans toute la Voie lactée, avec une attention toute particulière pour celles situées en périphérie. Et il se trouve qu’ils ont bel et bien repéré ces fameuses ondulations jusqu’à la frontière de notre galaxie. « Nous voyons que ces étoiles ondulent de haut en bas à des vitesses différentes », explique Paul McMillan, un astronome émérite affilié à la prestigieuse université de Lund, en Suède.
Ils ont ensuite cherché à confirmer que leurs observations étaient bien cohérentes avec le passage de Sagittarius. Pour ce faire, ils se sont livrés à un exercice qu’ils décrivent comme de la « sismologie galactique ». Ce n’est pas un terme officiel ou même courant dans la littérature scientifique, mais il a l’avantage d’être assez explicite.
Ils ont travaillé un peu comme les géophysiciens qui étudient le profil des ondes associées aux tremblements de terre, mais à l’échelle astronomique; ici, les astronomes ont construit une vaste simulation informatique qui représente les ondulations actuelles, telles qu’ils les ont observées grâce à Gaia. Ils ont ensuite extrapolé à partir de ces données pour voir comment ce phénomène aurait pu évoluer au fil du temps.
Et cette approche s’est avérée concluante ; leur modèle, l’état actuel de l’ondulation était compatible avec le passage du Sagittaire il y a plusieurs centaines de millions d’années, lorsque cette galaxie aujourd’hui mourante était bien plus massive.
Pour les chercheurs, cette confirmation est très intéressante, car elle pose des fondations assez solides qui permettront d’enrichir et de renforcer des tas d’autres travaux qui s’intéressent aux interactions entre corps célestes et à la dynamique globale du cosmos.
LiveScience rappelle par exemple une étude elle aussi menée grâce à Gaia et publiée en 2020 ; ses auteurs suggèrent que les collisions entre la Voie lactée et le Sagittaire auraient donné lieu à d’immenses « baby-booms » stellaires, c’est-à-dire la naissance d’une quantité invraisemblable d’étoiles dans un délai très court à proximité du point d’impact.
Les travaux de ce genre sont très importants pour comprendre quels mécanismes ont permis de définir l’architecture actuelle de l’univers, et il sera donc très intéressant d’en suivre les retombées.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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Merci pour cet article très clair !
Bonjour. Nous tous que nos chers Astrophysiciens comme les Géophysiciens et autres scientifiques de l ArchéoPréhistoires émettent régulièrement et à tour de rôle à travers le monde, de “belles” hypothèses!
Mais ici je m interroge plutôt sur les immenses mouvements de la voie lactée dans un milieu interstellaire (ISM) mélange de gaz ionisés, atomiques et moléculaires de rayons cosmiques et de “poussières”! D énormes bulles en couches, d hydrogène se superposes et peuvent ici “jouer” un grand rôle dans ces ondulations ? Simple avis.
Merci Thank you merci a Tous !