Le James Webb Space Telescope nous a déjà gratifiés d’une flopée de clichés grandioses depuis que ses premières contributions ont été dévoilées le 12 juillet dernier (voir notre article). Aujourd’hui, il revient avec du nouveau matériel esthétiquement moins percutant, mais au moins aussi intéressant sur le plan scientifique : voici la toute première image d’une exoplanète capturée par le nouveau fer de lance de la NASA.
On y redécouvre HIP 65426 b, une géante gazeuse qui n’a pas volé son qualificatif ; elle est en effet cinq à dix fois plus massive que Jupiter, l’immense matriarche de notre système solaire qui est elle-même environ 320 fois plus lourde que la Planète Bleue. Elle est cependant beaucoup plus jeune que notre planète; la Terre âgée d’environ 4,5 milliards d’années, contre environ 15 millions d’années pour cet objet.
Il s’agit déjà d’une date qui restera dans les annales d’après les astronomes à l’origine de ces travaux, même si d’autres télescopes ont déjà documenté HIP 65 426 b auparavant. « C’est vraiment un moment historique pour l’astronomie », exulte Sasha Hinkley, professeur d’astronomie affilié à l’Université d’Exeter interviewé par le Guardian.
Les exoplanètes se cachent en pleine lumière
Et l’équipe de recherche a toutes les raisons d’être ravie. En effet, observer directement des exoplanètes est un exercice très délicat ; il s’agit d’objets traditionnellement assez peu brillants, et donc pas évidents à visualiser. Mais la principale difficulté vient surtout de la présence des étoiles avoisinantes. Leur brillance largement supérieure à celle des objets avoisinants a tendance à cacher ces derniers ; capturer une image directe d’une exoplanète, c’est un peu comme tenter de photographier la lumière d’une bougie à côté d’un phare à des kilomètres de distance.
Ce constat vaut aussi pour les télescopes de pointe; eux aussi ont beaucoup de mal à réaliser des portraits d’exoplanètes exploitables. Même les plus puissants d’entre eux doivent faire appel à une combinaison de filtres et de processus de post-traitement; autrement, l’étoile viendra immanquablement « photobomber » l’image. Une limite qui a tendance à priver les astronomes de certains détails très fins et potentiellement déterminants.
La première exoplanète observée en infrarouge
Et cela commence à devenir une habitude, mais là encore, il s’agit d’un cas de figure où les performances exceptionnelles du JWST vont complètement changer la donne. Cette observation est un peu particulière puisque c’est la première fois qu’une exoplanète a pu être observée dans l’infrarouge, la longueur d’onde à laquelle opère ce bijou à 10 milliards de dollars.
Cette nouvelle approche a déjà permis aux astronomes d’observer HIP 65 426 b à des longueurs d’onde qui leur étaient complètement invisibles jusque là, malgré le fait qu’elle soit environ 10 000 fois moins brillante que son étoile ! Ils ont donc pu récolter des détails beaucoup plus précis qu’à l’accoutumée, notamment sur sa masse et sa température.
Par exemple, ces observations ont déjà permis de montrer que son atmosphère est une véritable fournaise; sa température tourne autour des 1300 °C. Selon les chercheurs, cela suggère qu’elle contient probablement de grandes quantités de poussière de silicates. Un élément qui lui donnerait alors une jolie teinte cramoisie une fois observée en couleurs réelles.
Le JWST, futur meilleur ami des chasseurs d’exoplanètes
À terme, ils estiment que l’invraisemblable précision du James Webb leur permettra d’aller encore beaucoup plus loin ; ils espèrent par exemple pouvoir étudier directement des variations météorologiques dans l’atmosphère des planètes ciblées. Rappelons que l’engin a récemment sa capacité à repérer des éléments chimiques précis dans l’atmosphère des exoplanètes (voir notre article).
On peut donc s’attendre à ce que l’étude des exoplanètes progresse à grande vitesse sur les années à venir. Il y a donc de quoi être très enthousiaste; il s’agit d’un autre angle d’attaque très intéressant pour étudier la structure et la dynamique de l’univers à grande échelle, les conditions d’apparition de formes de vie, et ainsi de suite.
Accessoirement, ces travaux montrent une nouvelle fois que le JWST n’est pas qu’un chasseur de galaxies ; il va apporter des contributions exceptionnelles dans de nombreux domaines des sciences spatiales. « Le James Webb va ouvrir la porte à une toute nouvelle classe de planètes qui étaient jusqu’à présent complètement hors de notre portée », résume Hinkley sur un ton songeur.
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