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Le James Webb a repéré une superbe “toile d’araignée” cosmique

Spoiler : les Arachnitects n’ont rien à voir là-dedans.

Depuis que la NASA a dévoilé ses premières contributions le 12 juillet dernier, le James Webb Space Telescope ne cesse plus de capturer des images fantastiques du cosmos. Récemment, il a ajouté une curiosité astronomique à son tableau de chasse avec un nouvel objet aussi magnifique qu’intrigant.

Au milieu de cette image composite, on distingue un système binaire d’étoile baptisée WR 140, mais ce n’est pas l’élément le plus marquant. Ce sont plutôt les lignes et les anneaux concentriques qui en émergent qui attirent immédiatement le regard.

Ensemble, ils forment une structure qui ressemblerait presque à une immense toile d’araignée cosmique ; une image assez extraordinaire qui rappellera peut-être l’œuvre des Arachnitects aux fans du cartoon Final Space. Mais si WR 140 intéresse tant les astronomes, ce n’est pas pour des raisons esthétiques ; c’est avant tout parce qu’il s’agit d’une manifestation d’un phénomène qui semble assez rare à l’échelle de l’univers.

Les lignes droites qui émergent du point lumineux n’ont rien de très intéressant. Il s’agit simplement de ce qu’on appelle des aigrettes de diffraction (diffraction spikes en anglais). Comme leur nom l’indique, il s’agit d’imperfections de l’image liées à la diffraction de la lumière. Dans le cas du Webb, elles sont provoquées par les imperfections du miroir principal et par la structure qui soutient les miroirs secondaires ; on les retrouve sur toutes les photos du télescope.

Une querelle de voisinage lourde de conséquences

Ces traits lumineux ne sont donc pas « réels » et ne correspondent pas à un phénomène qui se déroule au voisinage de l’étoile ; il s’agit simplement d’un artefact visuel. En revanche, ce n’est pas le cas des anneaux concentriques ; ils résultent d’un phénomène bien réel, rare, difficile à observer, et par extension très intéressant pour les spécialistes. Et pour comprendre leur origine, il faut s’intéresser aux particularités des étoiles qui composent le système.

© NASA, ESA, CSA, Leah Hustak (STScI), Joseph DePasquale (STScI)

D’un côté, on trouve WR 141, une étoile de Type O. Ce sont les astres les plus massifs qui existent ; ils sont aussi extrêmement chauds et brillants. Ils brûlent leurs réserves à une vitesse affolante, ce qui leur confère une espérance de vie très limitée. Ces étoiles de Type O émettent également de puissants vents stellaires.

De l’autre, on a WR 140, une représentante d’une catégorie rare que les astronomes considèrent comme des descendants des étoiles de Type O ci-dessus ; on parle d’étoile Wolf-Rayet. Il s’agit d’astres extrêmement chauds, massifs et lumineux qui approchent de la fin de leur cycle de vie ; ils émettent ce qu’on peut assimiler à un long râle d’agonie en expulsant de grandes quantités de matière sous forme de vents stellaires extrêmement rapides avant de terminer leur vie en apothéose à la faveur d’une gigantesque supernova.

Ces deux objets font partie d’un même système binaire, c’est-à-dire deux étoiles gravitationnellement liées qui orbitent autour d’un barycentre commun. Parfois, les orbites des deux étoiles peuvent être quasiment circulaires et concentriques ; dans ce cas de figure, elles décrivent donc de jolis cercles et peuvent tourner l’une autour de l’autre pendant des millénaires sans se croiser une seule fois.

Un “oignon” cosmique illuminé par les étoiles

Mais dans le cas de WR 140, la situation est assez différente puisque les deux orbites sont elliptiques et de tailles très différentes. Les deux étoiles passent donc périodiquement très près l’une de l’autre ; cela génère une violente collision entre les vents stellaires issus des deux astres, comme le montre cette modélisation.

À chaque passage, l’onde de choc associée arrache alors une grande quantité de matière qui forme comme une « bulle » poussiéreuse autour du point d’impact. Au fil du temps, ce phénomène a produit une structure en “oignon”, avec de nombreuses bulles concentriques. D’après ScienceAlert qui a repéré ces travaux, il s’agit de matière carbonée, et donc susceptible d’absorber le rayonnement ultraviolet issu des deux étoiles. Cette poussière se met donc à chauffer et à rayonner dans l’infrarouge, ce qui permet au JWST de les observer.

Ces cercles repérés par le JWST ne sont donc pas des anneaux, mais des bulles de poussière mises en évidence par le rayonnement des étoiles. Et l’autre point très intéressant, c’est que le système présente une périodicité très précise ; les deux étoiles se « croisent » et produisent donc une bulle tous les 7,94 ans.

Cela signifie que si on pouvait observer l’intégralité de ces bulles, on serait aussi en mesure de déterminer précisément depuis quand les deux étoiles interagissent de cette façon, exactement comme on déterminerait l’âge d’un arbre en comptant les cernes !

Les implications concrètes de cette découverte sont encore assez peu claires en l’état, car les astronomes à l’origine de cette observation sont toujours en train de préparer le papier de recherche sur la question. Il faudra donc attendre la fin du processus de révision par les pairs pour connaître précisément les tenants et aboutissants de cette découverte. Mais ce qui est certain, c’est que le Webb n’a pas fini de donner du grain à moudre aux spécialistes et de régaler son public !

Le papier de recherche en pré-publication est disponible ici.

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