Pour la toute première fois, une équipe de chercheurs est parvenue à réaliser une observation très impressionnante : ils ont suivi des atomes individuels pendant qu’ils se déplaçaient dans une fine couche de liquide. Des travaux qui pourraient rapidement se mettre à peser lourd dans la recherche fondamentale en physique et en chimie.
Même si cette perspective faisait saliver John Dalton et les autres illustres scientifiques qui ont travaillé sur ces objets au cours de l’Histoire, le fait d’observer un atome isolé n’est pourtant plus exceptionnel à notre époque.
En une décennie, nous avons par exemple vu fleurir des travaux très impressionnants sur ce sujet. On peut citer cette incroyable photo d’un atome individuel, ou encore la toute première observation directe d’atomes en mouvement dans un matériau brut. En revanche, reproduire cette observation dans un liquide est une autre paire de manches.
Une observation retardée par des limites techniques
Le souci, c’est que les rares techniques qui permettent de réaliser ces observations fonctionnent très mal dans ce milieu. Parmi les technologies qui permettent habituellement d’observer des atomes individuels, il y a notamment la microscopie électronique par transmission (ou TEM) et ses dérivés. Mais malheureusement, cette technique nécessite d’enfermer l’objet à observer dans une petite chambre à vide. Le problème, c’est que les propriétés de très nombreux matériaux changent radicalement avec la pression. Tout sauf idéal pour étudier leur comportement…
Et cette limite technique laisse une zone d’ombre considérable dans les modèles physiques actuels. C’est particulièrement dommageable pour les chercheurs, car la compréhension de ces interactions est cruciale dans un tas de domaines divers et variés ; maîtriser cette dynamique permettrait de faire des progrès significatifs en mécanique des fluides, en physiologie humaine, sur le fonctionnement des batteries… et ainsi de suite.
« Étant donné l’importance très étendue de ces comportements dans l’industrie et la science, c’est très étonnant que nous ayons encore tant de choses à apprendre sur les fondamentaux de l’interaction des atomes sur une surface en contact avec du liquide », explique Sarah Haigs, chercheuse en science des matériaux à l’Université de Manchester.
Avec ses collègues, elle a donc cherché un moyen d’observer ce phénomène pour en étudier les diverses implications. Et ils ont enfin réussi à y parvenir en se basant sur les conclusions de plusieurs travaux précédents.
Des atomes qui flottent dans un sandwich de graphène
Le premier concept qu’ils ont réutilisé a été documenté dans une étude de 2016. Les chercheurs y ont présenté un concept de TEM capable de fonctionner dans un environnement liquide ou gazeux. Mais pour atteindre le niveau de précision requis, cet appareil ne se suffit pas à lui-même.
Dans un microscope optique standard, l’objet est traditionnellement emprisonné entre deux lames de verre. Ici, l’équipe s’est basée sur une étude qui a montré le potentiel des lamelles de graphène. C’est un matériau parfait dans ce cas de figure. Il prend la forme d’une grille d’atomes de carbone qui ne mesure qu’un atome d’épaisseur. Il est aussi résistant et entièrement inerte, ce qui signifie qu’il ne peut pas y avoir de réaction chimique parasite entre le graphène et l’objet étudié.
Les chercheurs ont rempli ce sandwich nanométrique d’une solution saline où résidaient quelques atomes de platine. Et leurs efforts ont été récompensés ; grâce au TEM à phase liquide, ils sont parvenus à observer ces atomes évoluer dans leur minuscule piscine.
L’autre bonne nouvelle, c’est que cette nouvelle technique a déjà permis de tirer quelques conclusions sur l’interaction entre les solides et le liquide. Dans leur communiqué, les auteurs expliquent avoir constaté que le liquide accélère le déplacement des atomes et modifie leurs points d’ancrage préférentiels. Et ce n’est qu’un début.
« C’est une réussite marquante », affirment les chercheurs. Ils sont déjà en train de chercher à utiliser ce procédé pour accélérer le développement de matériaux et de processus industriels respectueux de l’environnement. En l’occurrence, il s’agit de la production d’hydrogène vert. Mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres pour cette technologie qui pourrait avoir des implications profondes dans de nombreux domaines.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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