En 2017, des astronomes sont tombés sur PSR J0952-0607, un corps céleste un peu particulier. Il s’agit d’une étoile à neutrons en rotation extrêmement rapide dont les propriétés étonnantes ont poussé les chercheurs à s’y intéresser de plus près. Cinq ans plus tard, une nouvelle équipe présente les résultats de ses investigations ; elle affirme désormais qu’il s’agit de l’étoile la plus dense jamais observée dans l’histoire de l’astronomie.
PSR J0952-0607 fait partie de la catégorie des étoiles à neutrons. Ces objets apparaissent lorsqu’une étoile massive arrive à court de carburant ; elle ne peut donc plus entretenir ses réactions thermonucléaires qui l’animent ; son cœur s’écroule alors sur lui-même. Cette masse se retrouve alors soumise à des forces de compression dantesques, ce qui a pour effet d’agglomérer la majorité des particules sous forme de neutrons.
On se retrouve alors avec un objet relativement petit, mais très lourd et donc exceptionnellement dense ; on estime généralement que 15 cm3 de ce matériau pèserait environ… 10 milliards de tonnes. En l’état, on considère que ces étoiles à neutrons sont les objets les plus denses du cosmos, à l’exception des trous noirs.
Une densité encore jamais vue chez une étoile
Et même parmi cette cohorte de petits poids lourds, PSR J0952-0607 se démarque par sa masse invraisemblable ; malgré sa petite taille, elle est 2,35 fois plus lourde que le Soleil, ce qui en fait tout simplement l’étoile la plus dense jamais repérée.
Et ce n’est pas la seule caractéristique de cette étoile. Comme une grande partie de ses congénères, elle est en rotation très rapide. Cela signifie que le rayonnement qu’elle produit (en particulier les rayons X, rayons gamma et ondes radio) nous parvient sous forme de pulsations, avec un pic à chaque tour de l’étoile ; on parle donc de pulsar.
PSR J0952-0607 effectue environ 700 rotations complètes par seconde. Il ne s’agit pas d’un record dans l’absolu, mais là encore, c’est un chiffre impressionnant ; à titre de comparaison, la plupart des pulsars se contentent de quelques rotations par seconde ! Il s’agit donc d’un des pulsars les plus rapides jamais identifiés.
Cette vitesse de rotation extrême est directement liée à un autre point très intéressant : la situation matrimoniale de cette étoile. En effet, elle fait partie de ce qu’on appelle un système binaire composé de deux astres qui orbitent autour d’un centre de gravité commun. De façon très imagée, on peut considérer qu’elles tournent l’une autour de l’autre.
Une “veuve noire” qui se nourrit de sa compagne
Et dans ce cas de figure, il ne s’agit pas vraiment d’une relation saine. Car depuis son effondrement et sa transformation en étoile à neutrons, PSR J0952-0607 est devenue cannibale. A cause de sa masse importante, elle génère aussi une puissante attraction gravitationnelle contre laquelle sa compagne ne peut tout simplement pas lutter; comme une véritable veuve noire, elle s’est donc mise à dévorer sa voisine vivante en absorbant progressivement le gaz qui la compose.
Cet ensemble de propriétés est très excitant pour les chercheurs. En effet, cette masse exceptionnelle pourrait bien cacher des informations cruciales sur des phénomènes encore mal connus qui ont lieu dans ces étoiles. La plus importante d’entre elles concerne d’ailleurs l’état de cette matière.
« Nous savons grossièrement comment la matière se comporte à une densité nucléaire, comme dans le noyau d’un atome d’uranium », explique Alex Filippenko, professeur d’astronomie à Berkeley. « Une étoile à neutrons est un peu comme un noyau géant, mais quand vous avez l’équivalent de 500 000 masses terrestres de ce matériel compressé dans un si petit espace, la façon dont les atomes vont se comporter n’est pas claire du tout », précise-t-il dans un communiqué.
Autant dire que PSR J0952-0607 va probablement devenir un véritable laboratoire à ciel ouvert pour les chercheurs qui souhaitent étudier ces phénomènes encore mystérieux. Mais en attendant de nouvelles révélations, ces travaux montrent déjà que ces étoiles à neutrons peuvent atteindre une masse bien plus importante que prévu avant de se transformer en trou noir.
Et cela a déjà permis d’affiner les modèles cosmologiques actuels. « De nombreux modèles populaires sur le comportement de la matière très dense sont invalidés par ce résultat », affirment-ils. Il ne reste plus qu’à préciser les théories qui ont survécu pour savoir ce qui se trame au cœur de ces étoiles.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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