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Pourquoi Jupiter n’a-t-elle pas d’anneau majestueux comme Saturne ?

Les quatre Lunes les plus massives de Jupiter sont certes remarquables, mais elles ont aussi pour effet de la priver d’anneau.

Si Saturne est l’une des coqueluches des amoureux d’astronomie, c’est en grande partie à cause de ses somptueux anneaux de roche, de poussière, et surtout de glace. Ils sont d’autant plus remarquables que Jupiter, sa plus proche parente dans le système solaire, doit se contenter de quelques maigres anneaux transitoires si peu visibles qu’une partie du public ignore même leur existence.

Depuis des lustres, les spécialistes spéculent et débattent pour tenter de faire la lumière sur cette différence. Plusieurs hypothèses existent, mais des travaux récents viennent peut-être de trancher en faveur d’un scénario déjà privilégié par une partie de la communauté scientifique ; l’action combinée d’un gang de planètes massives empêcherait ces anneaux de se former.

Quatre empêcheurs de tourner en rond

Comme souvent en astrophysique, ces travaux reposent largement sur des simulations informatiques à très grande échelle. Et c’est encore plus vrai dans ce cas de figure. En effet, Jupiter n’est pas du genre solitaire ; elle est entourée d’une cohorte de 80 lunes auxquelles il faut encore rajouter tout un tas de satellites mineurs.

Cette armada est bien trop vaste pour être simulée dans son intégralité. Les chercheurs ont donc choisi de s’intéresser aux quatre corps célestes particulièrement remarquables qui dominent le voisinage de Jupiter ; il s’agit des satellites galiléens, à savoir Io, Europe, Ganymède et Callisto.

Les satellites galiléens de Jupiter. © NASA

Ces quatre objets sont fascinants à bien des égards ; en plus de leurs propriétés individuelles, on sait par exemple que les trois premiers présentent un phénomène de résonance orbitale. Mais ce qui intéresse les chercheurs aujourd’hui, c’est leur rôle dans le devenir de ce fameux anneau.

Ils ont donc tenté de simuler des tas de scénarios différents. L’objectif : trouver des conditions qui pourraient permettre d’observer un anneau en plus de ces lunes. Et d’après leurs travaux, cette cohabitation est tout physiquement impossible ; une conclusion qui vient corroborer l’ hypothèse déjà privilégiée par de nombreux spécialistes.

Un chamboule-tout gravitationnel permanent

En astronomie, c’est souvent la loi du plus fort — ou plutôt, du plus lourd — qui l’emporte. Plus la masse d’un objet est importante, plus celui-ci exerce une force gravitationnelle intense, susceptible d’avoir une influence sur les objets avoisinants.

À chaque passage d’une lune galiléenne, les forces gravitationnelles associées viennent brasser la poussière et la glace qui s’accumulent en périphérie ; la plus grande partie de ce matériel serait tout simplement éjectée de son orbite par ce quatuor. La poussière et la glace n’auraient donc pas le temps de s’accumuler tranquillement pour former un bel anneau.

« Les planètes massives forment des lunes massives, et cela les empêche de développer des anneaux substantiels » » explique Stephen Kane, chercheur à l’Université de Californie de Riverside et auteur principal de l’étude. « Elles détruisent rapidement n’importe quel anneau de grande taille qui pourrait se former » précise-t-il.

Une fenêtre sur le passé cataclysmique des planètes

Cette confirmation permettra aux chercheurs d’améliorer leur compréhension globale des mécanismes qui aboutissent à la formation des anneaux. Et c’est important, car ces derniers ne sont pas que des curiosités qui font le bonheur des astrophotographes; ce sont aussi des archives cosmologiques fascinantes pour les chercheurs.

En effet, le matériel qui les constitue provient souvent de nombreuses collisions entre des comètes, des satellites, et même des planètes à part entière ; ils débordent donc d’indices sur le passé souvent violent des planètes qu’ils encerclent.

« Pour nous les astronomes, ce sont les taches de sang sur les murs une scène de crime », explique Kane. « Quand on regarde les anneaux d’une planète géante, c’est une preuve que quelque chose de catastrophique s’est passé », conclut-il.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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