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Une étoile zombie a miraculeusement survécu à sa propre supernova

Cette naine blanche semble avoir miraculeusement survécu à la gigantesque explosion thermonucléaire qui signe habituellement le glas de ses congénères, et personne ne sait pourquoi.

Des astronomes ont récemment fait une découverte extrêmement surprenante : ils ont repéré la trace d’une naine blanche qui semble avoir survécu à sa propre supernova, ce qui pourrait remettre en question une bonne partie des connaissances des spécialistes sur ce phénomène.

Au cours de sa vie, une étoile passe par différents stades. Les astres dits de la séquence principale, comme le soleil, sont le siège de réactions thermonucléaires à la puissance terrifiante. Une fois le carburant indispensable à ces réactions épuisées, elles peuvent emprunter deux voies distinctes en fonction de leur masse.

Les naines blanches, des étoiles en fin de vie

Les plus lourdes deviennent des étoiles dites supergéantes. La majorité d’entre elles, en revanche, finissent sous forme de géantes rouges. Ces dernières continuent d’enfler et de refroidir progressivement, jusqu’à éjecter toute la partie périphérique de l’étoile ; on obtient alors des nébuleuses qui laissent derrière elles des naines blanches. En substance, il s’agit des cœurs de ces étoiles en bout de course.

Mais si elles sont chimiquement plus ou moins mortes, ces naines blanches ne sont pas inertes pour autant. Ce sont des objets extrêmement massifs par rapport à leur taille relativement modeste ; et cette particularité est au centre d’un phénomène fondamental de la cosmologie.

Une vue d’artiste d’une naine blanche en train de tirer le matériel avoisinant vers elle. © University of Warwick – Mark Garlick

Comme tous les objets aussi lourds, les naines blanches exercent une force gravitationnelle monstrueuse. Elle ont tendance à arracher tous les corps célestes avoisinants à leurs orbites respectives. Cela donne lieu à un festin gargantuesque ; pendant une période très courte à l’échelle de la vie de l’étoile, cette dernière se gave de tout ce matériel.

Elle se dirige ainsi vers un seuil baptisé « masse critique » ; une fois dépassé, la structure de cette étoile désormais obèse n’est plus stable. Elle finit par disparaître dans une explosion thermonucléaire aux proportions dantesques. On parle alors de supernova (en l’occurrence, une supernova de type Ia)… ou du moins, c’est le scénario qui faisait plus ou moins l’unanimité jusqu’à ce que les astronomes ne fassent la connaissance de 2012Z.

Une étoile zombie rescapée de sa propre supernova

Ce matricule désigne une supernova repérée en 2012 dans une galaxie nommée NGC 1309, à 120 millions d’années-lumière de la Terre. Et par chance, il se trouve que le vénérable Hubble avait déjà tiré le portrait à ce coin de ciel par le passé. Les chercheurs ont donc rouvert les archives du télescope pour tenter de retrouver la trace de cet événement.

Cela leur a permis d’identifier le système précis où il s’est déroulé ; ils ont repéré une naine blanche particulièrement vorace en train de cannibaliser une étoile à proximité, vraisemblablement une géante rouge. Un objet qui ressemblait fort au candidat parfait

La galaxie NGC 1309, théâtre de cette découverte spectaculaire. © NASA / ESA / Hubble Heritage Team (STSCI/AURA) / A. Riess (JHU/STSCI)

Cette observation était déjà très impressionnante à bien des égards. C’était notamment la toute première fois que des scientifiques ont déniché une image d’une naine blanche avant l’explosion fatidique. Mais plus les chercheurs progressaient dans l’interprétation des données, plus un nouveau mystère semblait émerger.

En effet, contre toute attente, les images les plus récentes pointaient toutes dans la même direction : non seulement la fameuse naine blanche serait toujours là après cet événement apocalyptique, mais elle serait même plus brillante qu’auparavant ! De quoi faire froncer les sourcils de tous les chercheurs impliqués. « Personne ne s’attendait à voir une étoile survivante encore plus brillante », concède l’astronome américain Curtis McCully dans un communiqué.

Un exemple unique dans la littérature scientifique

Hubble commencerait-il à loucher ? Une grosse erreur se serait-elle cachée dans l’interprétation des spécialistes ? Après de nombreuses vérifications, ces deux issues semblent désormais très improbables et les chercheurs privilégient une autre piste ; selon eux, cette naine blanche serait en fait une « étoile zombie » issue d’une supernova qui aurait mal tourné.

D’autres astronomes ont déjà mentionné des supernovas de ce type (on parle de supernovas Iax) dans la littérature spécialisée. Mais jusqu’à présent, personne n’était parvenu à confirmer la survie d’une étoile avec des images avant, et après le cataclysme. Désormais, tout l’enjeu va donc être de déterminer comment elle a pu s’en tirer à si bon compte, mais aussi de statuer sur l’origine de sa brillance inhabituelle.

La brillance de cette naine blanche laisse les astronomes perplexes. © McCully et al.

Les chercheurs ont d’ailleurs leur petite idée sur le déroulement des événements. Selon eux, la supernova aurait été bien moins puissante qu’on pourrait s’y attendre dans ce cas de figure. Cela signifie que le nuage de matière issu de la supernova (on parle de rémanent) a été éjecté avec une force moins importante qu’à l’accoutumée.

Habituellement, ces rémanents peuvent parcourir une distance considérable. Mais ici, il n’aurait même pas eu assez de traction pour échapper à l’emprise. Selon toute vraisemblance, il aurait donc rapidement refait le chemin inverse vers la naine blanche. Il serait alors resté prisonnier sous l’effet de la gravitation. Ce rémanent surchauffé pris en otage par l’étoile serait la principale source de cette luminosité surprenante.

Les chercheurs suggèrent que le signal capté par Hubble pourrait aussi être amplifié par la luminosité de l’étoile avoisinante, elle aussi surchauffée par la supernova. Le reste de la luminosité proviendrait du matériel radioactif éjecté dans l’espace interstellaire.

En revanche, ces pistes ne permettent pas de faire la lumière sur toutes les zones d’ombre. Il reste encore des incohérences au niveau chronologique, puisque cette luminosité semble aussi diminuer bien plus lentement que prévu.

Des implications profondes en cosmologie fondamentale

Mais surtout, le phénomène responsable de cette supernova avortée reste toujours aussi mystérieux. Et les chercheurs comptent bien parvenir au fin mot de l’histoire. « Maintenant, nous avons besoin de comprendre ce qui fait échouer une supernova de type Iax, et ce qui définit une supernova de type Ia normale », explique McCully.

Et ce n’est pas simplement pour le plaisir de se creuser les méninges. « Les implications pour les supernovas de Type Ia sont profondes », martèle l’astronome. En effet, les variations de luminosité des supernovas sont des données fondamentales dans l’étude du cosmos. Elles servent de points de repère qui permettent aux astronomes d’étudier certains des phénomènes les plus obscurs et intéressants de notre monde, comme l’expansion de l’univers ou la fameuse énergie noire qui représenterait près de 70 % de l’univers.

Pour les chercheurs, il est donc très important de maîtriser l’ensemble des facteurs qui peuvent faire varier cette luminosité, comme ces supernovas avortées de type Iax. Ils vont donc continuer à travailler sur cette curiosité cosmologique unique en son genre.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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1 commentaire
  1. Elle faisait partie d’un système binaire ? Je vois mal comment on pourrait la distinguer de sa compagne à cette distance…

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