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Sur Mars, deux séismes exceptionnels enregistrés dans la “zone d’ombre”

La sonde martienne InSight a récemment enregistré deux séismes assez exceptionnels grâce auxquels les chercheurs ont pu ausculter les entrailles de la planète rouge.

Mars a beau avoir fait l’objet de milliers d’études différentes, elle continue de susciter des tas de questions auxquelles les chercheurs tentent de répondre grâce à divers engins, dont certains qui ont été déployés directement sur place. Le plus en vogue d’entre eux est certainement le dernier arrivé, à savoir le rover Perseverance, dont les exploits ne cessent d’ébahir les planétologues.

Mais ils ne sont pas les seuls à faire de grandes découvertes. À l’autre bout de la planète rouge, c’est la sonde InSight qui vient de s’illustrer avec une belle observation; son sismomètre embarqué a récemment été secoué par deux séismes assez impressionnants.

Ces deux événements, baptisés S1000a et S0976a et, ont été détectés en septembre 2021. Depuis, les opérateurs de la sonde ont eu tout le loisir de décortiquer les données. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que de nombreuses surprises les attendaient au tournant.

Les plus gros “marsquakes” jamais enregistrés

Ils ont pu déterminer que ces événements avaient atteint des magnitudes respectives de 4,1 et 4,2 sur l’échelle de Richter. Il s’agit donc de secousses qui, sur Terre, auraient été qualifiées de relativement modérées; mais sur Mars, ces chiffres sont exceptionnels. Il s’agit même d’un record toutes catégories. En effet, ces deux séismes étaient environ 5 fois plus puissants que n’importe quel autre séisme martien enregistré à ce jour.

Ces secousses provenaient de la Valles Marineris, le “Grande Canyon” de Mars. © NASA/JPL/USGS

Et la puissance de ces secousses n’est pas le seul élément qui a intrigué les chercheurs. “Il ne s’agit pas seulement des événements les plus puissants et distants avec une marge considérable, S1000a a aussi présenté un profil sismique et une durée sans équivalent à notre connaissance”, explique Anna Horleston, sismologue à l’Université de Bristol et auteure principale de l’étude dans un communiqué. En effet,

L’emplacement de l’épicentre est tout aussi remarquable. Ces séismes sont originaires de la Valles Marineris, une zone parfois désignée comme le “Grand Canyon” de Mars. Et pour cause ; il s’agit du plus grand complexe de canyons de tout le système solaire. Space.com rappelle que des chercheurs avaient déjà identifié des traces qui pointaient vers des séismes passés dans la zone. Mais c’est la première fois qu’une activité sismique y est enregistrée. Et le simple fait d’avoir pu enregistrer ces relevés est déjà perturbant en soi.

En effet, les sismographes se basent majoritairement la détection de deux types d’ondes sismiques : les ondes P et S. En recoupant les données issues de plusieurs capteurs qui ont capté ces ondes, on peut ensuite déterminer le positionnement exact de l’épicentre et tout un tas d’autres données intéressantes.

Une carte des événements sismiques en question. © Horleston et al.

Un séisme localisé dans la “zone d’ombre sismique”

Le problème, c’est que les ondes, dont la lumière, sont capricieuses; elles ne se propagent pas de façon uniforme dans tous les milieux. On peut citer l’exemple bien connu du laser qui change de trajectoire lorsqu’il passe de l’air à un autre milieu comme le verre ou l’eau. On parle alors de réfraction, et ce phénomène existe aussi pour les ondes sismiques.

Par conséquent, la vitesse de l’onde et sa trajectoire changent radicalement en fonction des milieux qu’elles traversent. C’est un élément intéressant pour les géologues. Il permet en effet d’identifier les différentes structures du sous-sol en étudiant minutieusement le comportement de l’onde.

Mais cela a aussi une conséquence plus handicapante : la forme sphérique des planètes fait que peu importe où le sismographe est positionné, il existe forcément une “zone d’ombre” dans laquelle il est théoriquement impossible de détecter ces ondes P et S. (voir la vidéo ci-dessous). Ils ont cependant réussi à contourner ces limites en se basant sur deux autres types d’ondes bien plus délicates à analyser, les ondes PP et SS.

Une fenêtre sur les entrailles de Mars

Enregistrer des événements à travers cette zone d’ombre est un vrai progrès dans notre compréhension de Mars”, se réjouit Savas Ceylan, sismologue à l’ETH Zurich et co-auteur de l’étude. “Puisque ces ondes traversent aussi la zone centrale qui est habituellement responsable de la zone d’ombre, nous pouvons étudier des parties de Mars que nous n’avons jamais pu sonder sismologiquement auparavant”, précise-t-il.

Désormais, ils continueront de décortiquer ces données en espérant découvrir quelques pistes intéressantes sur la dynamique et les contraintes de la croûte, du manteau et du cœur de la planète rouge. Mais ces mesures ne se suffiront pas à elles-mêmes; il faut donc espérer que d’autres secousses de ce genre permettront de compléter le vaste puzzle de la géologie martienne, avec tout ce que cela implique pour nos connaissances globales de Mars et pour la recherche de traces de vie passée.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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