Ce n’était qu’une question de temps. À une époque où l’aérospatiale privée prend de plus en plus d’ampleur et où le tourisme spatial semble en passe de se démocratiser, SpaceX a une nouvelle fois écrit l’histoire avec une grande première; la firme va transporter un équipage 100% privé de quatre astronautes civils jusqu’à la Station spatiale internationale.
Comme on l’avait déjà constaté lorsque Virgin Galactic et Blue Origin ont emmené les premiers équipages civils aux portes de l’espace, les prix étaient une nouvelle fois astronomiques. Chaque passager de la capsule Crew Dragon aurait apparemment dû débourser environ 55 millions de dollars, même si ce montant n’a pas été confirmé officiellement.
Cet équipage de novices est composé des hommes d’affaires Larry Connor et Marth Pathy, et de l’ancien pilote de l’Air Force israélienne Eytan Stibbe. Ils pourront toutefois se rassurer grâce à la présence d’un autre passager bien plus expérimenté; il s’agit de Michael López-Alegría, un ancien astronaute de la NASA. Une qualification qui lui a valu l’honneur d’être désigné commandant de la mission.
Un équipage 100% civil n’avait encore jamais rejoint l’ISS
Il faut cependant faire une distinction importante : il s’agit de la première fois qu’un équipage composé à 100% de civils va rallier l’ISS. Mais cela ne signifie pas pour autant qu’aucun novice de l’espace n’y a mis les pieds. Un équipage russe s’y est déjà rendu pour tourner un film intitulé “Le Défi”. Un milliardaire japonais s’était également offert ce privilège entre temps. Tom Cruise a aussi déjà prévu d’aller y tourner un film.
Mais tous étaient ou seront systématiquement accompagnés par des professionnels chevronnés et en activité, ce qui ne sera pas le cas de cette mission. L’autre particularité de cette mission, c’est que les intéressés refusent tout net la qualification de “touristes de l’espace”. Et il ne s’agit pas que d’une frustration sémantique; il y a bien une vraie différence d’approche par rapport aux “vrais” touristes, comme ceux qui ont pris part à la mission Inspiration4.
En effet, cet équipage restera environ une semaine à bord de la station. Et pas question d’y faire de la figuration ou de s’y tourner les pouces. Ils emportent avec eux un total de 25 expériences scientifiques bien définies. Elles sont aussi plus sérieuses que celles pratiquées par l’équipage d’Inspiration 4, qui relevaient plus de l’activité thématique que de la vraie science.
Des civils, mais pas des touristes pour autant
Ils participeront à des travaux en lien avec des sujets aussi variés que sérieux comme la physiologie en microgravité ou la météorologie. Pour boucler ce programme, ils resteront environ une semaine à bord de la station. Un délai conséquent qui leur a imposé un entraînement très exigeant.
“C’est important de différencier les astronautes privés des touristes spatiaux”, explique Larry Connor. “Nous avons passé entre 750 et 1000 heures à nous entraîner”, assure-t-il pour illustrer la différence avec les 10 à 15 heures nécessaires dans le premier cas.
Une formation qui leur aura permis d’apprendre les rudiments de la vie dans l’espace; cela concerne des manœuvres critiques à réaliser en situation d’urgence, mais aussi des tâches du quotidien comme l’hygiène en microgravité.
Mais cela reste évidemment incomparable au programme des astronautes professionnels. Ces derniers passent des années entières à s’entraîner; il leur faut absolument maîtriser toute la logistique de l’ISS sur le bout des doigts et être capables d’assumer des missions à l’extérieur de la station, ce que nos néophytes ne feront sous aucun prétexte.
Dans tous les cas, c’est une nouvelle étape symbolique de franchie sur la route d’un tout nouveau paradigme. L’aérospatiale était à l’origine la chasse gardée exclusive des agences gouvernementales comme la NASA. Mais depuis es années 2000 et en particulier depuis 2014, cette industrie s’est mise à pivoter vers un nouveau modèle.
Une nouvelle étape vers l’aérospatiale privée de demain
Aujourd’hui, nous avons des entreprises privées extrêmement puissantes, autant en termes technologiques qu’économiques. On peut citer SpaceX, qui en est indiscutablement le meilleur exemple, mais ils ne sont pas les seuls. Et cette nouvelle industrie, où le privé joue désormais un rôle déterminant, est en train d’ouvrir la voie à une seconde phase de transformation avec l’ouverture progressive au grand public.
À l’heure actuelle, nous sommes encore loin de pouvoir parler de démocratisation; après tout, les riches clients susceptibles de s’offrir un voyage à plusieurs dizaines de millions ne courent pas les rues. Mais plus le temps passe, et plus cette échéance semble se rapprocher.
L’industrie déborde d’ailleurs de signes qui pointent clairement dans ce sens; on peut notamment citer SpaceX et ses fusées réutilisables ou Blue Origin et son vaste projet de stations spatiales touristiques. Et ils ne sont pas les seuls; les standards de l’industrie commencent à évoluer, lentement mais sûrement, pour favoriser ce type de missions.
C’est d’ailleurs le tout premier objectif d’Axiom, l’entreprise qui s’est associée à SpaceX dans le cadre de cette mission. La firme a déjà prévu trois autres missions de ce type pour préparer la création de sa propre station spatiale spécialement prévue pour accueillir des civils.
“Cela représente vraiment la première étape où quelques individus qui veulent faire quelque chose de significatif en orbite, et qui ne sont pas membres d’un gouvernement, peuvent profiter de cette opportunité”, explique Max Suffredini, ancien responsable de l’ISS pour la NASA et désormais PDG d’Axiom.
Ce n’est pas demain que Madame et Monsieur Tout-le-Monde pourront louer une nuit à bord de l’ISS comme dans un hôtel. Mais ce qui est sûr, c’est que cette échéance se rapproche à vive allure; si l’aérospatiale continue sur sa lancée, la génération suivante pourrait bien devenir la première à pouvoir commander un aller-retour en fusée comme on achète un billet de train.
Le décollage est prévu à 17h17 heure de Paris. Vous pouvez le suivre sur le site de SpaceX ou sur le stream de la NASA dans le corps de l’article.
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C’est combien le bilan carbone de ces petites vacances spatiales ?