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La NASA veut (encore) un nouvel alunisseur, et Jeff Bezos se frotte les mains

Après avoir été débouté au terme d’un feuilleton aussi mémorable qu’embarrassant, Blue Origin va avoir une nouvelle occasion de se greffer au programme Artemis.

À la surprise générale, la NASA vient d’annoncer qu’elle allait finalement accorder un second contrat d’alunisseur, plus d’un an après avoir sélectionné SpaceX et débouté Blue Origin au terme d’un feuilleton pour le moins rocambolesque.

Contrairement au contrat signé l’an dernier, celui-ci ne concerne plus la mission Artemis 3 qui est déjà plus ou moins verrouillée. Il s’agit de préparer un second alunisseur pour une mission ultérieure . L’objectif : commencer à poser les bases d’une logistique lunaire de routine après le retour en grande pompe. Cette mission devrait avoir lieu en 2026 ou 2027.

Une extension majeure du programme Artemis

Cette annonce plutôt discrète cache donc une extension majeure du programme Artemis. Pour rappel, il s’agit d’une ambitieuse série de missions qui vont progressivement ramener l’humain sur la Lune au cours des prochaines années. Cela commencera très bientôt par un vol non habité (Artemis 1). La NASA enchaînera ensuite sur un vol habité autour de la Lune (Artemis 2), avant de s’y poser avec Artemis 3, vraisemblablement en 2026.

Ce nouveau contrat sera ouvert aux entreprises américaines à une exception près; SpaceX, qui a déjà hérité du premier contrat, ne pourra pas en réclamer un second. La firme d’Elon Musk doit déjà s’occuper de la construction de l’Human Landing System. Pour rappel, il s’agit de la pièce maîtresse de la mission Artemis 3; c’est à bord de cet engin que les astronautes retourneront poser le pied sur notre satellite.

C’est donc un contrat excessivement prestigieux et très rémunérateur, en termes financiers, mais aussi et surtout d’image de marque. Il était aussi convoité par d’autres entreprises; la NASA avait en effet laissé entendre qu’elle pourrait éventuellement en accorder plusieurs. Une issue sur laquelle comptait beaucoup Blue Origin, la firme de Jeff Bezos, qui ambitionne de concurrencer SpaceX à tous les niveaux.

Un rendu du camp de base Artemis tel qu’imaginé par la NASA. © NASA

Blue Origin immédiatement sur les rangs

Malheureusement, la NASA n’a reçu qu’un quart de l’enveloppe qu’elle avait demandé au Congrès américain pour cette échéance (850 millions contre 3,4 milliards). Elle a donc du faire des concessions, et son choix s’est porté sur Blue Origin, jugé trop gourmand et trop présomptueux dans les négociations.

La firme de Jeff Bezos a donc été écartée après avoir joué avec le feu à grands coups de manœuvres commerciales douteuses. Une situation qui a excédé le conseil d’administration de Blue Origin, qui a répondu par un feu nourri d’actions en justice qui ont paralysé le programme pendant plusieurs mois avant d’être débouté une bonne fois pour toutes.

Jeff Bezos, beau joueur pour l’occasion, s’est rangé derrière le verdict du tribunal. Mais il a également été très clair sur le fait que la pilule avait eu beaucoup de mal à passer; tout sauf une surprise, sachant que c’est son rival à la fois personnel et commercial qui s’est taillé la part du lion à ses dépens. On peut donc s’attendre à ce que la firme se positionne de façon particulièrement agressive sur ce nouvel appel d’offres, et fait de facto partie de favoris.

L’annonce de ce nouveau contrat n’est donc certainement pas tombée dans l’oreille d’un sourd; Blue Origin s’est immédiatement mise sur le sentier de la guerre et va courir après ce contrat couteau entre les dents. “Blue Origin est prêt à entrer en compétition”, s’est empressé d’affirmer un porte-parole de la firme à TechCrunch.

Le programme Artemis est une plateforme importante pour le développement de l’aérospatiale du futur; SpaceX et Blue Origin ne le savent que trop bien et jouent des coudes pour récupérer ces missions prestigieuses. © NASA

SpaceX va aussi y gagner

Mais même si elle ne pourra pas prétendre à un nouveau contrat, cette extension du programme représente aussi un gros changement pour SpaceX. Et pour cause : le contrat qui lie déjà la firme d’Elon Musk à la NASA va être sensiblement modifié.

Le précédent contrat devait techniquement prendre fin après Artemis 3. Après cette mission, un second contrat opérationnel aurait pris le relais; il était prévu que SpaceX se transforme en prestataire qui vendrait des voyages en Starships à la NASA pour les voyages suivants. Désormais, dans le cadre de ce nouveau contrat, la NASA attend de SpaceX qu’elle produise un second alunisseur une fois qu’elle aura terminé celui d’Artemis 3.

Il pourrait donc bien y avoir un alunissage supplémentaire dans le cadre du programme Artemis. La NASA n’a cependant pas précisé ce qui se passerait après cette échéance. On peut s’attendre à ce que SpaceX et le futur lauréat de ce nouveau contrat soient systématiquement mis en compétition pour chaque lancement.

Elon Musk
C’est aussi une bonne nouvelle pour SpaceX, qui va apparemment pouvoir produire un second alunisseur pour le compte de l’agence. © Tumisu – Pixabay / Elon Musk

La compétition repart de plus belle

C’est en tout cas une stratégie qui serait cohérente avec le positionnement de Bill Nelson. L’administrateur de la NASA n’a jamais caché sa volonté de faire de la NASA un acteur majeur de la transition vers ce nouvel écosystème, où l’aérospatiale privée jouera un rôle prépondérant. “J’ai promis de la compétition, en voilà”, a-t-il déclaré.

Cela implique évidemment d’introduire une forme de sélection par la concurrence; or, la NASA est aujourd’hui parfaitement positionnée pour jouer ce rôle de pivot. Elle peut pousser les acteurs privés à jouer des coudes en proposant des technologies toujours plus performantes à des prix de plus bas et dans des délais de plus en plus courts.

Pour l’instant, la NASA se refuse encore à parler argent; nous ne savons pas encore combien cela va lui coûter, combien elle compte demander au Congrès, ou encore quelle somme ce dernier sera prêt à lui accorder. La réponse à toutes ces questions arrivera vraisemblablement au cours du printemps, lorsque le budget de l’administration américaine sera dévoilé le 28 mars prochain.

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