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Des souris paralysées remarchent grâce à une greffe de cellules humaines

Des chercheurs israéliens ont fait remarcher des souris paralysées en leur greffant de la moelle épinière cultivée à partir de cellules humaines. Un résultat impressionnant qui confirme les avancées spectaculaires constatées ces derniers mois.

Récemment, des chercheurs américains sont parvenus à rendre l’usage de leurs membres à des souris paralysées grâce à une nouvelle approche basée sur un réseau de nanofibres. Aujourd’hui, c’est une équipe israélienne qui est parvenue à un résultat comparable grâce à une approche toutefois très différente, et peut-être encore plus prometteuse dans le cadre de la médecine humaine.

Dans leurs travaux publiés dans la prestigieuse revue Science Advances, des chercheurs du Sagol Center for Regenerative Biotechnolgy de Tel Aviv ont présenté une nouvelle technique qui leur a permis de reconstituer des tissus de moelle épinière humaine et de les implanter chez des souris paralysées. Au terme du protocole, 80% d’entre elles ont récupéré leur capacité à marcher.

Le résultat a beau être comparable à celui de l’équipe de la Northwestern University, la méthode est fondamentalement différente puisqu’elle se base directement sur des cellules souches issues de la lignée humaine, et non pas sur des nanofibres entièrement artificielles. Pour y parvenir, pas besoin de matériaux à la pointe de la technologie; il suffit d’un petit prélèvement de matière grasse.

Réécrire l’histoire des cellules

Les chercheurs ont ensuite séparé les cellules du tissu avoisinant afin de les reprogrammer. Ils les ont ensuite soumis à une manipulation dans le but de les ramener à un stade antérieur de développement, avant qu’elles ne se soient spécialisées pour remplir un rôle particulier. Elles reviennent alors dans un état relativement proche des cellules souches embryonnaires (on parle de cellule souche pluripotente), et bénéficient donc littéralement d’une seconde jeunesse. À partir de ce stade, elles sont donc capables d’emprunter une autre voie de développement et de produire un autre type de cellule.  Il ne reste plus qu’à les forcer à emprunter le chemin souhaité.

Dans le corps humain, ce processus de détermination est la conséquence d’un ensemble infiniment complexe de signaux chimiques – les morphogènes – produits dans les différents tissus. Au cours du développement, la combinaison de ces différents signaux va déterminer la nature et l’agencement de toutes les structures du corps : on parle alors de morphogenèse. Il existe par exemple un signal qui gère l’agencement des tissus sur l’axe antéro-postérieur, c’est-à-dire de la tête aux pieds; les cellules les moins exposées à ce morphogène au cours du développement se retrouveront du côté de la tête, et les autres migreront vers l’autre pôle.

C’est grâce à l’accumulation de ces nombreux signaux que l’organisme peut mettre en place son plan d’organisation à l’échelle globale, puis à l’échelle des différents tissus conjonctifs, musculaires,nerveux, ou autres. Pour les chercheurs, tout l’enjeu est donc d’exposer leurs cellules souches à la combinaison précise de signaux qui permettent, très sommairement, de dire aux cellules : “vous deviendrez des cellules de moelle épinière”.

La concentration en différents morphogènes détermine le devenir des différentes cellules en fonction de leur emplacement. © CSH Perspectives

De la cellule humaine à l’implant personnalisé

Pour y parvenir, ils ont commencé par recycler les restes du matériel qui a été séparé lors de la première étape pour produire un hydrogel personnalisé. C’est une étape très importante; puisque ce matériel est issu du même organisme, l’hydrogel résultant ne sera pas considéré comme un envahisseur par le système immunitaire. Il n’y a donc aucun risque de réaction de rejet. C’est un concept déjà exploré dans de nombreux travaux qui travaillent sur la culture d’organes sur mesure.

Dans ce contexte, cet hydrogel qui leur a servi de substrat pour transmettre les morphogènes. Ils ont ainsi pu cultiver des petites portions de moelle épinière humaine. Ces tronçons ont ensuite été greffés à des souris paralysées, certaines depuis longtemps (modèles chroniques) et d’autres récemment (modèles aigus). Au terme de l’expérience, 80% des modèles chroniques et 100% des modèles aigus avaient retrouvé leur capacité à marcher.

Des travaux pleins de promesses

C’est un résultat particulièrement encourageant. En effet, la quasi-totalité de la procédure serait techniquement déjà transposable à l’humain. C’est un avantage significatif qui devrait permettre d’accélérer considérablement le développement à grande échelle d’une procédure clinique. Les chercheurs espèrent d’ailleurs passer à cette étape le plus vite possible. Ils discutent actuellement d’un protocole préclinique avec l’administration américaine, et espèrent pouvoir passer à un essai clinique d’ici “quelques années”.

Il s’agirait en tout cas d’une véritable révolution médicale. Les travaux de ce type promettent déjà de transformer le quotidien de nombreuses personnes souffrant de lésions de la moelle épinière, qu’elles soient d’origine pathologique ou traumatique. Et le délai annoncé par les chercheurs semble loin d’être déraisonnable. Rien que ces derniers mois, nous avons vu fleurir tout un tas de projets sensationnels sur ce sujet. On pense notamment aux autres travaux mentionnés en début d’article. On peut aussi citer d’autres approches basées sur les interfaces cerveaux-machines qui commencent aussi à progresser; on se souvient par exemple qu’en décembre 2021, un homme paralysé avait pu poster son premier tweet grâce à une puce cérébrale.. Avec un peu de chance, même des paraplégiques pourront applaudir ces formidables avancées des deux mains dans un futur relativement proche.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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