Edward Snowden (les programmes de surveillance de masse de la N.S.A.), Irène Frachon (Médiator), Julien Assange et Chelsea Manning (Wikileaks), « John Doe » (Panama Papers) ont pris le risque d’être broyés par le système voire d’encourir des peines de prison en diffusant des informations confidentielles.
Rubicon nous propose encore mieux : incarner une lanceuse d’alerte !
Le timing, quoique involontaire, était parfait. C’est en octobre 2021 qu’est sorti le jeu Rubicon : la conspiration du silence, au moment même où se discutait en commission le projet de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte.
Le studio La belle Games a eu la brillante idée de proposer à Médiapart une Game Jam de 48 heures organisée dans les propres locaux du média. Journalistes et game designers de jeux vidéo se sont rassemblés en équipes pour créer des jeux « du réel », directement inspirés d’un travail d’enquête journalistique ou de gros événements d’actualité.
Rubicon, la conspiration du silence est un jeu narratif où vous incarnez Paula Cole, cadre en charge de la sécurité alimentaire au sein de Globalia, une importante multinationale de l’agro-business. La firme s’apprête à lancer un nouveau produit, Globalac. Vous rentrez de vacances, et vous êtes déjà surchargée de travail.
Analyses incomplètes du produit, dissimulations d’informations, changement inexpliqué du système de sécurité, mail anonyme d’un hacker, il y a clairement quelque chose qui ne tourne pas rond.
Vous échangez des textos et des mails avec vos collègues et vos supérieurs et assistez aux réunions avec le big boss. Le Game play hybride vous permet de choisir votre réponse parmi différentes phrases de dialogue ou parmi des mots clés. Chacune de vos décisions ont un impact sur l’histoire.
Vous devez analyser les documents, choisir d’accepter ou non un pot-de-vin, décider de protéger ou non certains membres de votre équipe. Tout est savamment construit pour vous donner l’impression d’être cette lanceuse d’alerte des prémisses de l’affaire jusqu’à sa révélation aux médias.
À la façon de la série Black Mirror, le jeu est passionnant, parfois dérangeant, en particulier à cause de sa résonnance avec la réalité. En effet, le cas n’est en rien fictif. François Bonnet, co-fondateur et journaliste de Mediapart, explique que chaque épisode du jeu est une agrégation de faits réels documentés par un travail de journaliste. Le personnage de Paula Cole s’inspire largement de Yasmine Motarjemi, cadre dirigeante de Nestlé, qui avait dénoncé le décalage entre le discours du groupe et la réalité de ses pratiques.
Comme nous l’explique le scénariste Thibaut de Corday, il ne faut pas y voir un message moralisateur pointant les méchantes multinationales et leurs pratiques, mais plus une invitation ludique à réfléchir sur le sujet. Effectivement, parmi les 8 fins possibles, toutes ne sont pas heureuses et aucune n’est idéale.
Ce format de jeu vidéo, empreint des mécaniques de jeux des visual novels ou des jeux d’aventure graphique comme l’incontournable « Life is Strange », est idéal pour permettre de sensibiliser le public aux problèmes sociétaux.
Souhaitons que Mediapart ne soit pas le seul à « franchir le Rubicon » et qu’éditeurs, voire institutions publiques, proposent des jeux qui nous sensibilisent aux problèmes actuels de notre société : harcèlement scolaire, « fake news », réchauffement climatique, laïcité, utilité du Service National Universel, etc.
Le jeu est disponible sur PC via Steam (8,99€), iOS (4,99€) et Android (5,99€). Sa durée est d’environ 5 heures.
Editeurs : La belle Games et Midnight, House Mood, avec le partenariat de Mediapart.
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