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Une étude montre le lien entre la fonte de l’Arctique et les feux de forêts américains

Des climatologues viennent d’identifier un “effet papillon” inquiétant qui relie directement la fonte des glaces de l’Arctique aux phénomènes climatiques extrêmes de l’Ouest américain.

L’un des aspects de la climatologie qui rendent cette science si compliquée à appréhender, c’est que les effets d’un phénomène être très éloignés de sa cause, aussi bien dans le temps que dans l’espace. Bien souvent, il faut des études assez poussées pour s’en rendre compte; c’est ce qui s’est passé avec les travaux d’une équipe de chercheurs américains; ils ont remarqué une corrélation directe entre les incendies dans l’Ouest du pays et la banquise de l’arctique.

Le lien invisible qui unit le climat de ces deux régions était déjà largement documenté, mais son origine restait pour l’instant inexpliquée. D’après l’équipe du climatologue Yufei Zou, ces deux régions seraient liées par une dynamique vaguement comparable à celle du fameux phénomène ENSO (El Nño – Southern Oscillation).

Ce n’est pas une analogie parfaite”, détaille le géologue et climatologue Hailong Wong. “Mais ce genre de connexions relèvent un peu de l’effet papillon. Les conditions climatiques d’un côté du monde peuvent, à terme, influencer le climat à des milliers de kilomètres”’, continue-t-il. “Dans notre cas, nous avons déterminé que la région arctique et l’ouest des États-Unis sont connectés par une relation de ce type. Le réchauffement local causé par la fonte des glaces déclenche un réchauffement et un assèchement dans l’Ouest plus tard dans l’année”.

Une déviation sur l’autoroute des vents

En plus d’apporter de nouvelles preuves solides de cette dynamique, les chercheurs ont aussi levé le voile sur les phénomènes sous-jacents qui l’alimentent. Ils expliquent qu’au fur et à mesure que l’air se réchauffe à cause de la fonte des glaces, la différence de pression atmosphérique génère un vortex au-dessus de la zone. Ce vortex perturbe alors la course du Jet Stream polaire. Un phénomène loin d’être négligeable, sachant que ce puissant courant d’air est absolument capital dans la dynamique climatique globale.

Ce changement de trajectoire a donc des conséquences très concrètes, dont une particulièrement importante; il détourne l’air humide que le Jet Stream achemine habituellement dans l’Est des États-Unis. Cette situation génère alors un second vortex, cette fois sur le sol américain, et qui tourne le sens opposé par rapport au vortex arctique. Et d’après les chercheurs, c’est ce second vortex inversé qui serait directement responsable de certains phénomènes climatiques extrêmes. Ils le tiennent par exemple pour responsable de l’invraisemblable canicule qui a frappé l’Amérique lors de l’été 2021. Cela aurait aussi pour conséquence de favoriser l’apparition des nombreux feux de forêt qui ravagent la région chaque année.

Un exemple très concert de cercle vicieux climatique

Et c’est particulièrement inquiétant, car cela pose les bases d’un cercle vicieux dont il sera très difficile de s’extraire. En effet, les chercheurs affirment que la banquise a déjà régressé d’environ 13% depuis le début de la décennie. A ce rythme, même le plus ancien des pergélisols, ces fameuses “glaces éternelles”, pourrait bien connaître des périodes de fonte totale dès 2050.

Or, comme mentionné plus haut, c’est cette fonte des glaces alimente largement cette dynamique. Moins il y a de glace, moins la Terre réfléchit les rayons du soleil et plus elle absorbe d’énergie. Elle se réchauffe donc davantage, ce qui a tendance à renforcer le vortex au-dessus de l’arctique. Celui-ci alimente donc la formation du second vortex; ce dernier déclenche à son tour des phénomènes climatiques comme les incendies, qui peuvent contribuer au réchauffement climatique global… et donc à la fonte des glaces. La boucle est bouclée, et ce n’est pas une bonne nouvelle.

La tendance est alarmante et incontestable”, explique Rick Spinrard, administrateur de l’agence américaine pour le climat. “Nous sommes à un moment décisif. Nous devons absolument agir”, tonne-t-il. Mais plutôt que de céder au fatalisme, les chercheurs préfèrent se réjouir de ces informations; désormais, ils ont davantage de cartes en main pour espérer endiguer ce phénomène. Reste désormais à voir si la volonté politique suivra.

Le papier de recherche est disponible ici.

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