En climatologie, tout est une question de cycles. Des événements solaires à la rotation des corps célestes en passant par la circulation des fluides, on observe des tas de phénomènes récurrents, et ce à toutes les échelles. Certains phénomènes se manifestent plusieurs fois par minute, tandis que d’autres se font désirer sur de très longues période; il devient alors bien plus difficile de les repérer au cours d’une vie humaine.
Certains de ces cycles ont des conséquences très concrètes sur le climat de notre planète; c’est par exemple le cas de certains cycles magnétiques du Soleil, dont on sait aujourd’hui qu’ils sont directement liés aux âges glaciaires de la Terre.
C’est d’”ailleurs l’une des raisons pour lesquelles l’humain a mis tellement de temps à se rendre compte de son impact sur le réchauffement climatique; pendant très longtemps, la science a considéré qu’il s’agissait simplement de la partie ascendante d’un cycle présent depuis des temps immémoriaux.
On sait aujourd’hui que ces deux phénomènes sont bien réels; le climat évolue de manière cyclique sur de grandes échelles de temps, mais l’humain a aussi un impact indiscutable sur le réchauffement climatique. Le problème, c’est que ces deux aspects ne sont pas indépendants et peuvent s’entre-alimenter; un scénario assez terrifiant, mais tout à fait plausible que redoutent les chercheurs de l’université de Bonn, en Allemagne.
Des épisodes de “déstabilisation abrupte”
Dans leurs travaux repérés par Futura, ils sont remontés jusqu’à la dernière période glaciaire, qui s’est terminée il y a environ 11.700 ans. En analysant des sédiments récupérés au fond de l’océan, ils ont identifié un curieux phénomène; depuis la fin de cet âge de glace, la banquise de l’Antarctique a connu plusieurs phases répétées “de déstabilisation abrupte”.
Durant ces phases, la banquise s’est partiellement disloquée; la fonte de ces icebergs errants a fini par causer une hausse dramatique du niveau des océans, qui pouvait atteindre plusieurs dizaines de mètres. Mais si ces perturbations ont changé la face du globe pendant des siècles, elles sont tout de même apparues très vite, en une dizaine d’années à peine – un temps extrêmement court en climatologie.
Les chercheurs ont donc travaillé à identifier les différents points de basculement qui ont causé ces phénomènes. Grâce à une vaste analyse croisée de nombreux paramètres, ils ont fini par mettre en évidence un ensemble de signes annonciateurs qui pourraient signifier le début de cette phase de dislocation. Et par conséquent, une brutale montée des eaux.
Le début d’une pente irréversible ?
Une observation intéressante, et nous en resterions probablement là… s’il n’y avait pas d’autres implications en lien avec le contexte actuel. Car malheureusement, il se trouve que les signes avant-coureurs abordés ci-dessus correspondent étonnamment bien à la situation que l’on constate en ce moment en Antarctique. Nous manquons encore trop de recul pour l’affirmer avec certitude; mais il existe donc une vraie possibilité que nous soyons dans la phase initiale d’une nouvelle phase de dislocation massive, avec tout ce que cela implique au niveau de la montée des eaux.
“Nos modélisations sont cohérentes avec de nombreuses preuves qui suggèrent que l’accélération de la perte de masse de glace représente un point de basculement”, expliquent les chercheurs dans leur communiqué.” Il pourrait mener à une fonte des glaces irréversible et durable, et donc à une montée des eaux globales”, avertissent-ils.
Un timing particulièrement inopportun, puisque nous n’arrivons déjà pas à gérer les conséquences de notre propre impact sur le climat. Il y a donc de quoi être pessimiste lorsqu’on imagine qu’un autre phénomène, indépendant de notre action, pourrait à son tour entrer dans la danse. Car aujourd’hui, les programmes de lutte contre le réchauffement sont basés sur des modèles qui ne tiennent pas compte de ces problématiques. Une fois n’est pas coutume, on ne peut qu’espérer que les chercheurs se soient trompés. Car s’ils ont visé juste, le climat tel qu’on le connaît pourrait changer radicalement d’ici une dizaine d’années à peine, indépendamment de notre action.
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