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Ce champignon transforme les mouches en zombies

Des chercheurs danois ont identifié un champignon capable de transformer des mouches en zombie, puis en véritables chevaux de Troie sexuels.

Notre environnement regorge de phénomènes époustouflants, qui flirtent parfois avec la magie. Mais lorsqu’on regarde derrière cette devanture féérique, Mère Nature peut aussi se révéler assez abominable. C’est la conclusion qui s’impose à la lecture de ces travaux de chercheurs danois repérés par ScienceAlert; ils ont en effet documenté le cas d’un drôle de champignon, qui transforme les mouches en véritables chevaux de Troie zombies.

Il y a effectivement de quoi froncer les sourcils, mais il s’agit pourtant d’une étude on ne peut plus sérieuse sur un parasite baptisé Entomophthora muscae. Pour assurer sa descendance, ce champignon a développé un stratagème aussi alambiqué que cauchemardesque qui commence avec de simples mouches.

Comme tous les êtres vivants, l’évolution a imposé à ces dernières une vocation non négociable: se reproduire, coûte que coûte. Mais si elles permettent d’assurer la survie de l’espèce, ces pulsions sont aussi un mécanisme qu’il est possible d’exploiter. Et c’est là qu’intervient Entomophthora muscae. Lorsque notre champignon pose ses spores sur une mouche femelle, il va se progressivement coloniser tout son organisme. Il finit par atteindre l’hémolymphe, l’équivalent du sang chez les insectes, et c’est là que commence un véritable film d’horreur animalier.

Une histoire de zombies digne d’Hollywood

Désormais bien installé chez sa victime, le champignon va continuer de pousser jusqu’à atteindre le système nerveux central. Une fois celui-ci atteint, les ramifications vont pénétrer jusqu’au cerveau de la mouche… et ainsi altérer complètement son comportement. La victime est désormais un vrai zombie, dont les instincts naturels ont été partiellement reprogrammés par le parasite. Mais ce n’est là que le début du processus. Une fois aux commandes, le champignon digère progressivement toute la mouche de l’intérieur. Une fois celle-ci dans un état critique, la contamination du système nerveux pousse la victime à ramper jusqu’à un petit perchoir en hauteur, où elle finira par mourir après quelques jours.

Les particules blanches qui émergent de cette “mouche-zombie” sont des spores en formation, qui permettront au champignon de démarre un nouveau cycle. © cobaltducks – iNaturalist

A ce stade, la mouche est cliniquement morte; mais le champignon, satisfait de son nouveau chez-lui, est loin d’en avoir fini avec sa funeste marionnette. Il continue sa croissance jusqu’à ce que le cadavre déborde complètement de conidies, qui sont de vraies petites usines à spores. Et puisque la mouche a pris la peine d’aller mourir en hauteur, ces dernières sont éjectées au premier coup de vent, donnant naissance à une nouvelle génération de champignons.

Dans la nature, le gâchis n’existe pas; Entomophthora muscae continue de former des conidies jusqu’à ce que toute la matière organique de la mouche soit épuisée. Si d’autres mouches sont à proximité lors de l’éjection, celles-ci peuvent être infectées par le champignon. Et avec un peu de chance, il peut même toucher le jackpot si une mouche mâle passe à proximité.

Un redoutable cheval de Troie

Car si le début du processus n’était pas encore assez relevé à votre goût, les chercheurs danois ont remarqué que le champignon disposait encore d’une dernière corde à son arc. Et c’est probablement la plus dérangeante de toutes. Une fois arrivé à maturité, le il ne se contente plus de produire des spores zombificatrices. Il concocte aussi un puissant aphrodisiaque pour mouches. Si un mâle passe à proximité, il est pris de pulsions irrésistibles. Si irrésistibles, en fait, que le pauvre bougre ne distingue même plus un animal vivant d’un animal mort.

Résultat : subjugué par ce philtre d’amour morbide, le mâle se rue sur le premier partenaire potentiel, qui se trouve bien souvent être un cheval – ou plutôt une mouche de Troie infectée par Entomophthora muscae, stratégiquement placée bien en évidence. Et comme chez les humains, les décisions prises sous l’emprise d’une pulsion sont souvent mal avisés. Dès l’instant où le pauvre mâle entre en contact avec le zombie, il s’expose aux spores du champignon, avec les conséquences funestes que l’on connaît.

C’est très loin d’être la première espèce à exploiter la reproduction d’autres animaux; on connaît par exemple de nombreuses plantes qui utilisent ce stratagème pour augmenter leurs chances d’être pollinisées. Mais d’après les chercheurs, c’est l’une des toutes premières fois qu’un champignon se montre capable de manipulations comportementales aussi larges, qui touchent même les organismes non infectés.

Au bout du compte, il ne s’agit pas seulement d’un film d’horreur entomologique. D’après les chercheurs, ces découvertes pourraient permettre d’en apprendre davantage sur les signaux moléculaires auxquels répondent les mouches. À terme, cela pourrait permettre de développer des répulsifs très utiles en santé publique. Ils pourraient notamment servir dans les régions où ces mouches sont vectrices de maladies humaines.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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