Samedi 16 octobre, la sonde Lucy de la NASA a décollé de Cap Canaveral pour un voyage qui l’amènera visiter les astéroïdes troyens de Jupiter.
Il s’agit d’un ensemble d’astéroïdes piégés dans l’orbite de Jupiter à proximité d’un point de Lagrange. Ils intéressent particulièrement les scientifiques, car à l’heure actuelle, aucun appareil ne s’y est jamais rendu. Nous ne disposons donc que de très peu d’informations à leur sujet.
Ce que l’on sait, en revanche, c’est qu’il s’agit d’un groupe très curieux à bien des égards. En l’état actuel de la recherche, il semblerait qu’ils aient été formés à de nombreux endroits différents, aux frontières de notre système solaire. L’objectif de Lucy sera avant tout d’étudier la dynamique de ces amas. En analysant leurs interactions, les chercheurs de la NASA espèrent pouvoir en apprendre davantage sur le processus qui conduit à la formation des planètes.
En quelques sortes, Lucy va donc voyager dans le temps pour en apprendre davantage sur la façon dont la Terre et ses homologues se sont formées. “C’est une fantastique opportunité de réaliser de belles découvertes en sondant le passé lointain de notre système solaire”, explique Tom Statler, l’un des chercheurs responsables du projet.
With A Little Help From My Friends
Il y a donc de quoi être excité quant aux promesses de ce petit engin baptisé en hommage à l’australopithèque découverte en 1974… et elle-même baptisée d’après la chanson des Beatles, Lucy In The Sky With Diamonds. Et il ne s’agit pas d’un clin d’œil anodin. Comme son homologue fossilisé, cette Lucy-là nous aidera aussi à démêler les fils de l’histoire de notre monde; elle le fera simplement à une échelle de temps bien supérieure.
Mais ce n’est pas demain qu’elle livrera ses premiers résultats. Pour les astronomes, il va falloir être patient, car cet engin mettra un certain temps à atteindre sa destination. Expédier un engin aussi loin n’a rien de trivial. Il ne s’agit pas de faire un simple saut vers l’orbite de la géante gazeuse, loin de là. La sonde ne dispose évidemment pas d’un carburant infini, et cela impose aux ingénieurs de ruser.
Pour éviter la panne sèche, Lucy va se livrer à une sorte de covoiturage cosmique. Dans la digne tradition des Beatles, elle aura besoin d’un peu d’aide de ses amis. En l’occurrence, il s’agira d’autres corps célestes, dont elle s’approchera à une distance et à un angle bien précis. Cela lui permettra d’utiliser leur attraction à son avantage pour modifier sa trajectoire. L’intérêt de cette manœuvre, baptisée assistance gravitationnelle, c’est qu’elle ne brûle pas une goutte de carburant. Il suffit de calculer méticuleusement la trajectoire en amont, et de se laisser catapulter vers sa destination !
Un plan de route alambiqué
Cela lui permettra cependant de s’aventurer bien plus loin qu’un moteur seul. Pour mener à bien sa mission, Lucy devra réaliser un total de trois assistances gravitationnelles. Après un premier tour du Soleil, elle bénéficiera une première fois de la gravitation terrestre pour dépasser Mars. Elle reviendra ensuite frôler la Terre une seconde fois en 2024, ce qui la propulsera vers les astéroïdes troyens.
C’est là qu’elle réalisera la première partie de sa mission, avec plusieurs survols très attendus des quatre premiers astéroïdes. Une occasion qu’il ne faudra absolument pas manquer, car il s’agira d’une fenêtre très courte. Elle repartira ensuite une nouvelle fois vers la Terre pour une nouvelle assistance gravitationnelle, en 2027. Cela lui permettra d’atteindre un second groupe de Troyens, qu’elle pourra étudier en 2033.
Si tout va bien, la mission commencera avec l’astéroïde 52246 Donaldjohanson, que Lucy atteindra en avril 2025. Une fois ses objectifs remplis, elle se stabilisera sur une orbite prédéfinie avant de s’endormir définitivement, et de laisser Jupiter décider de son sort. D’après les calculs des ingénieurs, cette dernière va soit la catapulter droit dans le Soleil, soit vers les confins du système solaire. Une fin en apothéose appropriée pour cette mission spectaculaire!
En plus de son attirail scientifique, Lucy embarque avec elle une plaque, remplie de nombreuses citations. Alors que les sondes Voyager avaient eu droit à leur message codé à destination d’une hypothétique civilisation extraterrestre, le message de Lucy est conçu pour être récupéré par nos descendants dans des millénaires.
MAJ 18/10 :
Dans un communiqué repéré par SpaceNews, la NASA a reconnu que la sonde avait des difficultés pour verrouiller ses panneaux solaires. En effet si le déploiement de ces derniers s’est passé sans encombre selon l’agence,le système de verrouillage semble être à la peine. L’institution américaine s’est voulue rassurante; en l’état, “Lucy peut continuer à opérer sans menacer sa santé et sa sécurité”, a assuré un porte parole de la NASA à la presse. Les ingénieurs en charge de la mission ont donc la tête plongée dans les données pour comprendre ce qui bloque et comment le problème pourrait être réglé dans les plus brefs délais.
Autour des astéroïdes troyens, la lumière du Soleil est très faible, et alors que sur Terre ces panneaux solaires peuvent produire 18 kilowatts, ils ne seront pas capable de générer plus de 500 watts; une énergie à peine suffisante pour faire fonctionner la sonde. Ils doivent donc absolument être déployés et déverrouillés complètement; une manœuvre dont la NASA va donc devoir s’occuper très prochainement, sous peine d’hypothéquer le reste de la mission.
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Good Bye Lucy, and good luck !