Ce n’est un secret pour personne, la crise environnementale que nous traversons est étroitement liée à notre alimentation. L’industrie de la viande, en particulier, est connue pour son impact à grande échelle et à de nombreux niveaux; un constat qui pousse certains individus à changer leurs habitudes pour devenir végétariens ou végétaliens.
Mais il existe également d’autres pistes; on peut par exemple citer la nourriture à base d’insecte, qui ressemble de plus en plus à une solution viable sur le long terme. Mais la barrière psychologique reste encore importante, et il faudra certainement attendre une évolution des mœurs avant de voir le criquet bourguignon s’imposer à la cantine.
Mais d’ici-là, il existe une autre alternative qui semble tout droit sortie de la science fiction : la viande artificielle cultivée en laboratoire. Ce concept, encore insolite au possible il y a deux ans de cela, fait pourtant son petit bonhomme de chemin; l’année dernière, Singapour a ainsi autorisé la vente de poulet artificiel, une première mondiale. Dans la foulée, le marché de la “viande alternative” pourrait atteindre les 140 milliards de dollars d’ici 10 ans, selon Barclays.
Le meilleur des deux mondes
Et apparemment, l’idée n’est pas réservée aux humains; en tout cas pas chez Shannon Falconer, PDG de la start-up Because Animals. Dans un article de CNBC repéré par SciencePost, cette ancienne microbiologiste de la prestigieuse université Stanford explique sa philosophie qui vise à transformer l’alimentation des chiens et des chats. Végétarienne revendiquée, Falconer souhaitait pouvoir proposer à ses compagnons préférés des menus qui ne nécessitent pas d’élevage industriel ou d’abattage.
Le souci c’est que les chiens sont des omnivores, et les chats des carnivores quasiment exclusifs; une problématique dont est bien consciente l’ancienne chercheuse. Pas question pour elle de les faire renoncer à leur régime ancestral sur la base de ses convictions; elle a donc continué à chercher une méthode capable de rassembler à la fois ses objectifs nutritionnels et éthiques. Cette solution, Falconer l’a trouvée chez des souris – ou plutôt, dans leurs cellules souches.
Les équipes de Because Animals sont parties de trois souris auxquelles elles ont prélevé des cellules souches. Une opération unique, ponctuelle et quasiment indolore, qui implique de leur percer l’oreille une seule fois et sous anesthésie (Les trois souris ont depuis été adoptées par la famille Falconer et vivent paisiblement à leur domicile). Ces cellules sont ensuite cultivées dans un bioréacteur aux normes de l’industrie agroalimentaire; elles sont enfin mélangées à d’autres ingrédients, comme de la citrouille ou des levures, afin de produire des friandises destinées aux animaux de compagnie, avec des protéines animales, mais sans en avoir sacrifié un seul. Le meilleur des deux mondes, en somme.
Objectif industrialisation
L’intérêt de Because Animals ne se limite pas au produit original que l’entreprise propose. Elle a également démontré des avancées significatives sur certains des points qui font habituellement douter de la viabilité de ce mode de production. L’une de ses limites inhérentes, c’est notamment la transposition à une échelle industrielle; la culture de cellules prend non seulement du temps, mais elle nécessite surtout un milieu de croissance spécifique pour leur permettre de prospérer.
Tout l’enjeu de ce mode de production, c’est donc de trouver un milieu de croissance qui soit largement disponible, renouvelable, et surtout peu cher. Là où beaucoup de concurrents utilisent le sérum de veau fœtal, un grand classique des laboratoires de biologie, Because Animals a développé son propre milieu de culture, très économique et sans produits animaux; sur le papier, c’est donc l’un des obstacles conceptuels à ce mode de production qui vient de tomber.
Ces friandises seront bientôt présentées au SuperZoo, l’un des plus grands salons animaliers américains. L’objectif à moyen terme de Because Animals va donc être de se lancer dans la production à grande échelle; reste à voir si le processus s’y prête raisonnablement bien. Mais surtout, rappelons que la vraie cible marketing de ces produits n’est pas les animaux, mais bien leurs maîtres ! Le vrai enjeu sera donc de voir si ce produit trouvera son public; en l’occurrence, il s’agit de maîtres qui souhaitent préserver l’alimentation ancestrale de leurs animaux, mais qui veulent également faire valoir leurs convictions écologiques… quitte à payer un prix qui s’annonce largement supérieur à celui de la nourriture animale industrielle standard. Autrement, la meilleure solution reste encore de sélectionner leur nourriture soi-même !
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