La recherche d’une civilisation extraterrestre avec laquelle nous serions capables de communiquer n’a toujours pas abouti, mais les astronomes ne se découragent pas pour autant. L’une des principales initiatives en la matière, Breakthrough Listen, vient d’ailleurs d’offrir une belle contribution à la communauté des chasseurs d’aliens, d’étoiles, ou de tous ceux dont le métier consiste à garder leurs instruments braqués vers les confins du cosmos. Cette contribution prend la forme d’une sorte de catalogue, baptisé Exotica. Mais rien à voir avec votre catalogue Ikea standard : celui-ci recense 737 objets qui représentent un exemplaire de chaque objet ou phénomène de l’univers observable, “des comètes aux galaxies, des objets mondains aux phénomènes célestes les plus rares et violents”.
Le projet vous semble ambitieux ? Vous ne croyez certainement pas si bien dire, et il s’agit d’ailleurs de la toute première tentative de cataloguer l’ensemble des phénomènes astrophysiques connus. Tout du moins, à notre époque contemporaine, car certains indices suggèrent que de grands astronomes grecs comme Ptolémée ou Aristote pourraient avoir entrepris de tels travaux de leur vivant. L’équipe du projet Listen espère que son catalogue pourra être utilisé par les astronomes comme une sorte de Guide du Castor Junior de l’espace, une sorte d’ouvrage de référence pour identifier différents phénomènes.
Où regarder, une question centrale en astronomie
Si l’idée pourrait paraître triviale, il n’en est rien. Aujourd’hui, les techniques d’observation progressent très rapidement mais il existe une difficulté qui n’a pas bougé d’un iota depuis les premiers almanachs des Mayas : pour observer quelque chose, encore faut-il savoir où regarder ! En fournissant une liste aussi exhaustive que possible des phénomènes observables, Exotica a vocation à guider l’œil des astronomes pour maximiser les chances de trouver du matériel intéressant, comme l’explique Brian Lacki, chef de l’équipe de recherche dans le papier correspondant :
“De nombreuses découvertes en astronomie n’étaient pas prévues. Parfois, des découvertes majeures ont été ratées quand personne ne regardait au bon endroit, tout simplement parce qu’ils croyaient qu’on ne pouvait rien y trouver.”
Les scientifiques du programme Listen ont même pensé au reste de la profession puisque leur catalogue ne s’arrête pas à la recherche de vie extraterrestre, mais pourrait bien bénéficier à des projets variés allant de l’étude de trous noirs à la recherche d’exoplanètes. C’est d’ailleurs exactement ce qui s’est passé dans les années 1980 au début de notre chasse aux exoplanètes, ces corps célestes relativement semblables à notre Planète Bleue. Pendant très longtemps, nous sommes restés convaincus que seule une étoile similaire à notre soleil pourrait permettre la vie telle qu’on la connaît. Et évidemment, les astronomes se sont donc contentés d’isoler les astres qui correspondaient à ces critères. Ce n’est que dans les années 1990 que les astronomes se sont enfin débarrassés de ce biais pour chercher autour d’autres types d’étoiles : un virage qui aurait pu survenir bien plus tôt si les astronomes de l’époque avaient eu Exotica sur leur table de chevet !
Le catalogue est subdivisé en quatre catégories. Tout d’abord, on trouve les objets célestes tels que les planètes, les satellites, les étoiles ou encore les galaxies. Le deuxième groupe renferme aussi des corps célestes, mais dont les propriétés extrêmes les empêchent d’être classés dans les archétypes de la première catégorie. On y trouve toutes sortes d’objets fascinants qui collectionnent les superlatifs : le quasar le plus lointain, le pulsar le plus rapide… et même quelques têtes connues, comme le trou noir le plus vorace, dont nous vous parlions pas plus tard qu’hier.
La troisième catégorie est tout aussi intéressante, si ce n’est davantage, puisqu’elle renferme les “anomalies”. Il s’agit de tous ces objets dont certaines caractéristiques laissent encore perplexe les plus grands cerveaux de la discipline. Un des exemples les plus parlants de ces objets célestes hétéroclites est une étoile répondant au doux sobriquet de KIC 8462852, plus connue sous le nom d’ “Etoile de Boyajian”… et surnommée “WTF Star”, un jeu de mot avec le titre d’un papier de recherche qui illustre bien ses propriétés uniques. Le quatrième groupe est un groupe de contrôle qui est de très loin le moins intéressant, mais demeure indispensable à la solidité scientifique du projet.
Dorénavant, le projet Breakthrough Listen prévoir de réserver 10% de son temps d’observation, soit une part conséquente, à certains des objets les plus mystérieux du catalogue. En particulier, le projet devrait se concentrer sur une douzaine d’objets “de haute priorité”, ce qui devrait leur prendre environ 800 heures de travail… et générer pas moins d’1,7 Petabytes de données, soit 1,7 millions de GB ! De quoi étoffer encore davantage Exotica… et, on l’espère de tout cœur, revenir d’ici quelques mois avec de nouveaux papiers fascinants sur certains cas particuliers.
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