Une équipe de recherche suisse du Laboratoire fédéral d’Essai des Matériaux et de Recherche et de l’Ecole Polytechnique de Lausanne – dont les travaux ont été publiés dans le PNAS – a mis au point le plus petit moteur jamais créé : composé de 16 atomes, il mesure moins d’un nanomètre, soit 100.000 fois plus petit qu’un cheveu humain et 100x plus petit qu’une particule de poussière moyenne ! Ce n’est pas le premier moteur moléculaire jamais conçu. À vrai dire, la nature ne nous a pas attendu et il en existe déjà de nombreuses sortes dans le monde vivant. On peut notamment citer la myosine, une protéine qui “tire” sur un axe pour participer à la contraction d’un muscle.
Comme son équivalent macroscopique, ce petit moteur est composé d’une partie fixe (le stator) et d’une partie en mouvement (le rotor). Le stator est constitué de six atomes de palladium et 6 atomes de gallium, tandis que le rotor est une molécule de 6 atomes d’acétylène. Ce moteur moléculaire peut être alimenté soit à l’aide d’énergie électrique, soit thermique. Mais dans la pratique, l’énergie thermique ne présente que très peu d’intérêt puisqu’à température ambiante, ce petit moteur tourne de façon totalement aléatoire. Avec un courant électrique, c’est une autre histoire et les chercheurs sont parvenus à faire tourner le rotor dans un seul et même sens, avec une probabilité de 99%.
L’équipe explique que cela le rend bien plus utile en pratique que les précédents moteurs moléculaires artificiels, qui avaient presque tous la fâcheuse manie de tourner de façon complètement chaotique. Cela ouvre la porte à des utilisations dans le cadre de nano-machines, ou même de récolte d’énergie selon l’un des auteurs de l’étude.
Quelques propriétés inattendues
S’il ressemble à un moteur classique sur le principe, son fonctionnement présente quelques étrangetés. Tout comme certains mécanismes à engrenages classiques, il est construit sur un système de crans, qui ont chacun une face abrupte et une face plus plate. Dans la théorie, le mouvement va se faire dans le sens du chemin de moindre résistance, c’est à dire en empruntant la face plus plate des crans. À l’inverse, la face abrupte empêche le mécanisme de revenir en arrière. Mais aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, ce petit moteur tourne bien dans une seule direction, mais dans le sens contraire à celui attendu ! En apparence, cela représente une transgression des lois de la physique et l’équipe de recherche ne parvient pas encore à expliquer pourquoi le rotor emprunte systématiquement le sens de rotation prévu pour être plus difficile.
Mais le plus étonnant, c’est que ce n’est pas la seule de ses caractéristiques qui va à l’encontre de la physique classique. À notre échelle, on sait qu’il y a besoin de fournir de l’énergie pour vaincre une force de résistance : si vous essayez de grimper une pente à vélo sans pédaler, vous n’êtes pas près d’arriver en haut… et pourtant, c’est en substance ce que semble faire ce petit moteur. Les chercheurs ont ainsi remarqué que même une minuscule quantité d’énergie thermique (-256°C) ou électrique (30 millivolts) suffisait à mettre le rotor en mouvement. C’est bien moins que la quantité théorique : pour reprendre l’analogie ci-dessus, cela reviendrait à grimper une pente à 40° en soufflant sur les pédales de votre bicyclette…
La physique quantique au cœur du mécanisme
Pour expliquer ces phénomènes étranges, les chercheurs suisses se sont aventurés dans le royaume encore mal connu de la physique quantique, et ont observé un phénomène nommé “quantum tunelling”. En substance, pour une particule, cela revient à traverser purement et simplement une barrière qu’elle n’aurait pas assez d’énergie pour passer, comme à travers un tunnel : si l’on reste sur l’analogie du vélo, il ne s’agit plus de grimper la pente mais de se téléporter directement au sommet.
Une observation fascinante, mais qui soulève autant de questions qu’elle n’en résout. Dans l’état actuel de nos connaissances sur ces “tunnels quantiques”, le phénomène n’est censé générer aucune friction. Physiquement, cela signifierait qu’il s’agirait d’un processus énergétiquement parfait, sans aucune perte due à ces frottements. Mais les auteurs expliquent que si c’était le cas, le rotor tournerait aléatoirement dans n’importe quelle direction. Le fait qu’il tourne dans une même direction 99% du temps suggère qu’il y a bel et bien une perte d’énergie quelque part dans le processus. Reste maintenant à identifier précisément la source de cette perte d’énergie, ce qui pourrait offrir une toute nouvelle perspective sur les mécanismes du quantum tunelling. Et par conséquent nous fournir de nouvelles clés de compréhension de cette discipline encore très mystérieuse qu’est la physique quantique !
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Je crois qu’il y a une erreur dans l’article… 1 molécule de 6 atomes d’acétylène n’a aucun sens… et si on additionne tous les atomes que vous donnez, on arrive à 18.
Le rotor est composé d’une molécule d’acétylène qui comporte 4 atomes, donc là on arrive au compte juste… Et avec des atomes qui existent (source: votre source)
Je connaissait pas les atomes d’acétylènes…