Le briefing a duré environ 45mn, et anniversaire d’Apollo oblige, la question du retour sur la Lune a forcément été abordée. Un sujet d’actualité, dans le cadre de la volonté affichée de l’agence spatiale d’effectuer un retour triomphal sur notre satellite en 2024.
https://twitter.com/JimBridenstine/status/1128086110247235584
A cette date, la NASA souhaite envoyer “la première femme et l’homme suivant” sur la Lune, dans un projet ambitieux, baptisé Artemis. Il comporte deux volets. En premier lieu, il s’agit de commencer sa colonisation et d’y établir une présence humaine sur le long terme… mais cette mission devrait également servir d’expérimentation en vue d’un futur voyage vers Mars. Et pour le très controversé administrateur de la NASA, une première mission humaine sur Mars en 2033 n’est pas à exclure.
En fait, nous travaillons en ce moment à mettre en place un plan exhaustif sur la façon dont nous conduirions une mission martienne, en utilisant la techologie que nous mettrons à l’épreuve sur la Lune. Je ne veux pas du tout exclure [une mission vers Mars en] 2033.
Cette date n’est pas choisie au hasard. Lorsqu’on souhaite voyager d’une planète à l’autre, il ne s’agit pas de viser l’astre en question puis de partir en ligne droite. Tout appareil voulant effectuer le voyage vers la Lune doit d’abord se placer en orbite terrestre, avant de s’éjecter de son orbite à un point très précis grâce à une forte accélération. Ce point est calculé de façon à ce que la trajectoire du vaisseau, qui s’éloigne désormais de la Terre, passe à portée de gravitation de l’astre visé. A ce moment, il va accélérer dans le sens inverse pour se placer en orbite stable autour du corps céleste de destination.
Un défi logistique
Mais la Lune, représente un exemple plutôt “simple” car elle est relativement proche de la Terre et surtout, qu’elle orbite autour de cette dernière. Dans le cas de Mars, la problématique est différente : la Terre et la planète rouge sont tous les deux en orbite autour du même corps (le Soleil). Non seulement la distance moyenne est plus élevée qu’avec la Lune, mais elle varie grandement selon la position des deux planètes sur leur orbite. Or, plus la distance est élevée, plus les contraintes logistiques sont importantes, par exemple en termes de carburant, ou pour des raisons humaines. Tout le challenge réside donc dans le fait de choisir avec précaution le moment du lancement pour effectuer le voyage le plus court possible : on appelle ces moments des fenêtres de lancement (launch windows), représentées par les couleurs les plus froides sur ce graphique.
On sait depuis longtemps qu’il existe une fenêtre pour un transfert Terre – Mars en 2033, qui durera deux ans. En croisant ces données avec les projections des avancées technologiques, la date de 2033 s’est imposée comme un bon compromis et de nombreux observateurs, souvent des politiques, poussent dans cette direction. C’est d’ailleurs une vraie volonté politique, comme en témoigne la décision du Congrès américain en Mars dernier.
Un projet très politique
C’est donc dans ce cadre que Bridenstine s’est senti obligé de réaffirmer sa volonté de mener ce projet à terme. Certains n’ont pas tardé à faire une lecture purement politicienne de cette annonce, à cause de la réputation sulfureuse de l’actuel administrateur de la Nasa. En effet, sa nomination par le président Trump en 2017 avait fait couler beaucoup d’encre. La faute au manque de qualifications scientifiques de cet ancien militaire, qui était encore à l’époque un fervent climatosceptique (une position à laquelle il a depuis renoncé sous la pression).
Un argument fort va en tout cas dans le sens d’une lecture purement politicienne de cette annonce. En avril dernier, le STPI (un groupe d’analystes réputés travaillant sur des questions de science et de technologie) a publié ses conclusions sur la question… et le moins qu’on puisse dire, c’est qu‘elles sont tout sauf concordantes avec l’ambition affichée par Bridenstine. Leur verdict est sans ambiguïté:
Le STPI a conclus qu’un départ pour une mission martienne en 2033 était infaisable selon tous les scénarios budgétaires, projections de développement technologique et programmes de test, selon les plans acctuels de la NASA. 2035 pourrait être possible […], mais comporte de gros risques […]. Nous pensons que 2037 serait la première date où un départ pour Mars serait faisable.
En plus du scepticisme du groupe d’analystes, les autorités américaines semblent avoir des difficultés à se mettre d’accord une bonne fois pour toutes sur le programme exact à mettre en place. On rappelle que Trump avait officialisé un programme gouvernemental qui entérinait le retour sur la Lune , avant une étrange pirouette sur Twitter qui n’a pas manqué de jeter le doute sur la solidité du programme.
For all of the money we are spending, NASA should NOT be talking about going to the Moon – We did that 50 years ago. They should be focused on the much bigger things we are doing, including Mars (of which the Moon is a part), Defense and Science!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) June 7, 2019
Reste donc à attendre 2020 pour la première estimation du coût du programme Artemis, qui donnera déjà de plus amples informations sur la faisabilité d’un voyage vers Mars en 2033. Mais à l’heure actuelle, et ce malgré l’optimisme affiché de l’administrateur de la NASA, les chances de voir cet espoir se concrétiser restent très maigres.
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Le problème c’est surtout d’abord une question de budget, de livré dans les temps tout ce qu’il y a à faire. Mais surtout ca peut prendre un gros coup de plomb dans l’aile facilement si ça désintéresse Trump, ou si ce dernier n’est pas élu pour un deuxième mandat. Rien ne dit que les démocrates ne veuille poursuivre le projet s’ils reviennent au pouvoir.
Ce qui pourrai énormément jouer finalement c’est l’évolution du programme spatial Chinois, comme celui des Russes avait jouer pour la conquête d’il y a 50 ans.