Lors de ce concours organisé par le mythique Jet Propulsion Laboratory de la NASA, les participants -tous des physiciens, mathématiciens, ingénieurs en aéronautique et en informatique chevronnés- doivent trouver des solutions efficaces à des problèmes extrêmement complexes. Après la gestion des débris spatiaux lors de l’édition précédente, il fallait cette fois se creuses les méninges pour accoucher d’un modèle efficace de colonisation de notre galaxie, rien que ça. D’après les organisateurs du GTOC, il s’agit d’une “ façon de favoriser l’innovation dans l’optimisation des trajectoires interplanétaires et l’entre-alimentation des idées entre chercheurs dans les domaines de l’astrodynamique et de l’optimisation.”
L’épreuve a été remportée par une équipe chinoise, composée de membres de la China’s National University of Defence Technology, et du Xi’an Satellite Control Center. Leur modèle est disponible ici.
La seconde place a également été ravie par des chinois, de l’université de Tsinghua cette fois. Cependant, leur modélisation n’a pas encore été publiée. C’est l’Advanced Concepts Team de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) qui complète le podium : voici la modélisation issue de leur travail.
Sur ces simulations, chaque point représente une étoile considérée comme potentiellement habitable, tandis que les lignes représentent les trajectoires empruntées par les colons.
En pratique, chaque équipe s’est vue remettre un ensemble de données représentant environ 100.000 systèmes d’étoiles et un ensemble d’équations détaillant avec précision les paramètres orbitaux des corps célestes en question. A partir de ce point, les équipes étaient livrées à elles-mêmes et devaient mettre au point leur propre méthodologie pour coloniser la galaxie le plus efficacement possible en 90 millions d’années, avec un certain nombre de contraintes :
- Chaque équipe démarre sa simulation avec deux vaisseaux mère (en bleu), et deux vaisseaux dits “rapides” (en vert).
- Chaque vaisseau mère contient dix “capsules de colonie” pouvant coloniser un système d’étoiles chacun
- Trois vaisseaux colons peuvent partir de chaque système deux millions d’années après l’avoir colonisé
- Chaque système ne peut être colonisé qu’une seule fois
- Pour simplifier, on considère que les étoiles ont une masse nulle. On en déduit qu’ il n’y a donc pas d’assistance gravitationnelle (ou “effet fronde”) possible
- les manœuvres orbitales des vaisseaux sont restreintes en termes de temps, de vitesse et d’accélération, sans quoi la solution serait considérée invalide
Pour désigner le vainqueur, les organisateurs ont mis au point une formule complexe, du genre à faire convulser les allergiques aux mathématiques et censée rendre compte de l’efficacité de la colonisation selon les principaux critères de l’épreuve. Si vous souhaitez y jeter un oeil, elle est disponible en page 4 des instructions. Pour maximiser son score, il fallait ainsi coloniser un maximum de systèmes en 90 millions d’années, avec la distribution spatiale la plus homogène possible, et en utilisant le moins de puissance de propulsion possible.
Un scénario très artificiel, mais une simulation néanmoins pertinente
Ces contraintes font de ce problème un véritable casse-tête logistique. Le choix de la destination des premiers vaisseaux, par exemple, est absolument crucial. Mais si l’exercice est fascinant intellectuellement, il n’a pas vocation à être une simulation entièrement réaliste. En témoignent les approximations mentionnées dans l’énoncé du problème.
Mais ce n’est pas parce qu’il ne s’agit pas d’un plan de conquête galactique servi sur un plateau que l’expérience est dénuée d’intérêt. A l’heure où la question des premiers voyages à l’échelle galactique commencera à se poser, il faudra résoudre des problèmes de ce type, mais d’un niveau de complexité encore bien supérieur, sans approximation de confort possible. Des initiatives comme le GTOC permettent donc de travailler sur une méthodologie et de mettre les modèles actuels à l’épreuve, en attendant de disposer de la technologie et de la connaissance nécessaire à la mise en pratique.
La Voie Lactée est âgée d’environ 13.500 millions d’années. Cette conquête virtuelle de 90 Ma ne représente donc même pas un petit pourcent de la vie de notre galaxie ! Un point intéressant à noter est que ce chiffre est concordant avec certaines études sérieuses sur la question.
De quoi jeter encore plus d’huile sur le brasier du paradoxe de Fermi, à travers lequel on tente de comprendre si nous sommes seuls dans l’univers, et si non, pourquoi aucune espèce extraterrestre n’a encore colonisé la galaxie de cette façon. Si vous n’êtes pas familier de cette fascinante expérience de pensée qu’est la paradoxe de Fermi, cet article de l’institut SETI le résume de façon très concise et élégante.
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Sympa. Par contre ils partent du principe que l’humanité ne se sera pas anéantie dans un futur plus ou moins proche. Déjà on est dans de la fiction.