Okko et les fantômes est sorti le 12 septembre dans les salles françaises, après un passage en compétition du prestigieux festival du film d’animation d’Annecy. Dans cette oeuvre pour toute la famille, on suit l’histoire d’Okko, une jeune orpheline, qui va se réconcilier avec la vie en s’investissant pleinement, malgré son tout jeune âge, dans l’auberge familiale. Elle y rencontrera des fantômes fripons qui l’aideront à mieux comprendre sa famille et son passé. Une fenêtre amusante sur la structure familiale japonaise, la campagne du pays, ses traditions et ses valeurs, mais surtout l’occasion de découvrir un nouveau réalisateur dans cette galaxie en expansion : Kitaro Kosaka.
À la bonne école
Kitaro Kosaka est né en 1962 dans la préfecture de Kanagawa. Il a passé une grande partie de sa vie à côtoyer les plus grands de l’animation japonaise, notamment en étant engagé comme animateur sur Goshu le violoncelliste d’Hisao Takahata. Si l’émergence d’une nouvelle personnalité (Makoto Shinkai, Mamoru Hosoda qui ne l’a pourtant pas en odeur de sainteté, Masaaki Yuasa, Naoko Yamada…) dans le monde de l’animation japonaise peut nous faire demander si elle devient « le nouveau Miyazaki », avec Kitaro Kosaka, la blague a un très gros fond de vérité. Kosaka a longtemps été dans l’ombre du maître, son « stagiaire » pour ainsi dire. Cette collaboration commence avec Nausicaa de la vallée du vent, puis Le Château dans le ciel. Il prendra du jalon, et sera l’un de ses hommes de confiance et directeur d’animation titulaire jusqu’à Le Vent se lève, heure (pour l’instant) terminale de Miyazaki. Il a décroché plusieurs prix des Tokyo Anime Awards pour ce poste. Bref, Kosaka est le yes man officiel de Miyazaki, et la rumeur veut qu’il aurait droit à son petit surnom, « monchi ».
C’est au début des années 2000 que Kintaro Kosaka commence, en parallèle, à tracer sa propre route. En 2003, il est sélectionné dans la Quinzaine des réalisateurs à Cannes pour le film Nasu, un été andalou. Avec Okko, il signe son premier long-métrage, et déploie enfin son potentiel et sa patte d’artiste.
La voie du simple et du familial
Dans Okko et les fantômes, le trait est très caractéristique. Peut-être avez-vous vu les premières affiches au style pastel : c’était un croquis préparatoire datant de cinq ans. Le style véritable du film est tout autre, et il saura plaire à toutes les générations. Kosaka anime avec un trait assez rétro, avec des proportions qui rappellent les meilleurs moments du début des années 2000, là où animation numérique et « traditionnelle » se conjuguaient encore. Idéal pour admirer la verdure japonaise, les temples, l’auberge et ses habitants. Kosaka s’amuse aussi à insérer des lieux communs plus contemporains (comme une irrésistible copine loufoque et pleine aux as) et à conjuguer les décennies pour en faire quelque chose de plus personnel. Les plus grands seront plongés en enfance, et les plus petits pourront se familiariser avec cette esthétique rétro. Un choix graphique intéressant qui, avec sa simplicité, permet de véhiculer des émotions fluides et efficaces.
Les têtes blondes seront d’ailleurs confrontées à des thématiques fortes. Le film s’ouvre sur un accident traumatique, et se finira sur la rédemption et le pardon. Il enseigne des valeurs fortes et belles (mais très japonaises), dont la satisfaction et la plénitude par le travail. La petite Okko s’occupe des clients et doit donc surmonter sa timidité. À travers ces personnages de fantômes fripons, Okko apprend le deuil, la résilience, mais aussi ce qu’est la transmission, l’histoire des adultes. Des choses que des têtes blondes peuvent commencer à appréhender, en somme. Kosaka signe un véritable récit d’initiation pour enfants, en prenant comme modèle une gamine facile à aimer.
Le film a aussi l’avantage de se bonifier avec le temps : sa dernière partie est la meilleure, quand il embrasse à fond son concept et voit défiler les clients, pour mieux préparer à un astucieux climax émotionnel. Et chacun pourra, comme dans de nombreux films d’animation et mangas d’aujourd’hui, se délecter devant les quelques recettes préparées par l’héroïne. Preuve qu’Okko et les fantômes et une oeuvre qui sait vivre dans son temps.
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