Une version sans publicité soutenue par les abonnements suffirait-elle à recruter de nouveaux utilisateurs ? C’est la question à laquelle souhaite répondre Facebook qui a mené des études de marché en ce sens.
Faux statuts mais vraie idée
Facebook payant, c’est une ritournelle qui revient chaque saison depuis la création du réseau social. Et surtout beaucoup de hoax qui circulent sur la plateforme. Vous avez certainement dû voir passer, si ce n’est partager, ce type de statut qui, en plus d’être long, n’a aucune valeur légale :
C’est maintenant officiel ! C’est paru dans les médias. Facebook vient de sortir son prix d’entrée : 5,99 € pour garder l’abonnement gold de votre statut de vie “privée”. Si vous collez ce message sur votre page, il sera offert gratuitement (j’ai dit coller pas partager) sinon demain, toutes vos publications peuvent devenir publiques. Même les messages qui ont été supprimés ou les photos non autorisées. Après tout, cela ne coûte rien pour un simple copier-coller. En raison du fait que Facebook a choisi d’impliquer un logiciel qui permettra le vol de mes renseignements personnels, je déclare ce qui suit : À cette date du Dimanche 20 septembre 2015, en réponse aux nouvelles lignes directrices de Facebook et en vertu des articles L.111, 112 et 113 du code de la propriété intellectuelle, je déclare que mes droits sont attachés à toutes mes données personnelles, dessins, peintures, photos, textes etc. … publiées sur mon profil. Pour une utilisation …commerciale de ce qui précède, mon consentement écrit est nécessaire en tout temps. Ceux qui lisent ce texte peuvent faire un copier/coller sur leur mur Facebook. Cela leur permettra de se placer sous la protection du droit d’auteur. Par ce communiqué, je dis à Facebook qu’il est strictement interdit de divulguer, copier, distribuer, diffuser, ou de prendre toute autre action contre moi sur la base de ce profil et ou de son contenu. Les actions mentionnées ci-dessus s’appliquent également aux employés, étudiants, agents et ou tout autre personnel sous la direction de Facebook. Le contenu de mon profil comporte des informations privées. La violation de ma vie privée est punie par la loi (UCC 1-308 1 – 308 1 -103 et le Statut de Rome). Facebook est désormais une entité de capital ouvert. Tous les membres sont invités à publier un avis de ce genre, ou si vous préférez, vous pouvez copier et coller cette version. Si vous n’avez pas publié cette déclaration au moins une fois, vous allez tacitement permettre l’utilisation d’éléments tels que vos photos ainsi que les informations contenues dans la mise à jour de profil.
En 2015, l’affaire avait pris de telles proportions que Facebook avait du démentir dans une publication
En effet, comme le CEO de Facebook, Mark Zuckerberg, l’a souvent répété, le modèle économique de la plateforme ne repose pas sur l’abonnement des utilisateurs, mais sur la publicité et plus précisément sur les données des utilisateurs, optimisées en profil consommateur, et revendues comme tel à des annonceurs. Facebook tire ainsi plus de 90% de ses revenus de la publicité.
Payer plutôt qu’être traqués
Depuis, le scandale Cambridge Analytica est passé par là et a mis en lumière le cynisme et le laxisme de Facebook en matière de données lorsqu’il s’agit d’utiliser ses utilisateurs comme de véritables vaches à lait. Son modèle économique a logiquement été remis en cause. Et les politiques poussent de plus en plus pour une régulation de la plateforme, quand des années d’autorégulation n’ont pas permis d’éviter les scandales et polémiques à répétition.
Si l’idée d’une version payante de Facebook a déjà été étudiée par le passé, elle trouve aujourd’hui un écho certain en interne après cette rupture de confiance, même si les plans ne sont pas très avancés et pourraient ne jamais aller de l’avant, expliquent des sources anonymes.
À l’époque, l’idée d’une version payante, mais dénuée de publicité, faisait déjà son chemin car les annonces représentaient alors (et représentent sans doute encore) l’une des principales raisons pour laquelle les internautes quittaient la plateforme. Mais d’après les audits menés en interne, l’option Premium aurait certainement été mal accueillie auprès d’utilisateurs à qui on a assuré que le service resterait gratuit.
Zéro publicité et zéro données ?
À présent, Facebook pense que le sentiment des membres a peut-être changé, qu’ils sont plus réceptifs à cette idée si cela peut leur permettre de naviguer sans être traqués, ou risquer de voir leurs données manipulées par une entreprise dont le but est de favoriser l’élection d’un candidat au poste suprême. Grâce à Cambridge Analytica, les équipes de Donald Trump auraient ainsi pu cibler plus précisément des électeurs indécis, vivants dans des États clés (les fameux swing states), susceptibles de faire pencher la balance, ou qui étaient tout simplement réceptifs aux idées du magnat républicain. Encore faut-il leur présenter une version premium digne de ce nom dans laquelle les utilisateurs n’effectueraient pas un double passage en caisse.
Le désormais célèbre, “si c’est gratuit, vous êtes le produit”, a été largement intégré par les internautes : ils “cèdent” leurs données grâce auxquelles Facebook se rémunère grassement via des publicités ciblées, et ils peuvent ainsi utiliser la plateforme “gratuitement”. Dans le cas d’une version payante, mais dénuée de publicités, cela signifierait-il que les nouveaux utilisateurs n’ont aucune données à fournir ? Et les anciens utilisateurs qui voudraient passer à l’abonnement, leur restituerait-on leurs données (si tant est que ce soit possible) ou n’auront-ils simplement pas de publicité sur la plateforme ? Quid des données déjà collectées ? L’idée est peut-être en gestion, mais le modèle reste vraiment à définir.
Depuis l’affaire CA, Facebook tente par tous les moyens de redorer son blason : Mark Zuckerberg n’a pas échappé à deux jours d’intenses auditions devant le Congrès américain, durant lesquelles il a annoncé de nouvelles mesures (qui n’en étaient pas vraiment) pour préserver la confidentialité de ses utilisateurs et restreint l’accès à leurs données aux développeurs d’application.
Interrogé sur l’avenir de la plateforme, son CEO a encore assuré qu’« il y aura toujours une version gratuite de Facebook ».
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