GTA n’est pas le premier du type mais il est l’exemple le plus accessible, le plus répandu. Tout le monde le sait, le jeu se présente comme un monde ouvert dans lequel on peut enchaîner les missions et les allers-retours sur la carte. Le jeu prévoit (incite) le joueur à glander, tuer des gens et voler des coupés Cabriolet. On peut aussi tenter de grimper sur cette montagne au loin, faire de la balançoire avec sa voiture ou organiser des concours entre potes sur le mode en ligne. De ce jeu avec la physique du moteur et les bugs naît le gameplay émergent. Tourner en rond et faire des bêtises devient en quelque sorte sa marque de fabrique. Ne vous y trompez pas, les développeurs ont conscience que l’on détourne leurs jeux et nous tendent volontairement des perches pour y parvenir. D’autres par contre n’en ont même pas conscience au moment de créer leur univers et ses règles. L’émergence naît alors de l’exploitation de glitchs et d’une analyse profonde des mécanismes (rocket jump dans Quake, le ski dans Tribes). Dans tous les cas, le joueur s’approprie le jeu. Il triche sans tricher. Il manipule les règles, il teste et il prend des notes pour plus tard.
L’étape supérieure, c’est le speedrun. La création d’un tracé, le chrono imposé, l’esquive d’un maximum de segments de jeu dans le seul but de remplir un objectif précis et de se créer sa propre « histoire ». L’étape d’après, celles qui nous fait pousser des cheveux longs et dorés, c’est la création d’objectifs complètement absurdes. Prenez Super Mario 64. Finir le jeu avec le moins d’étoiles possibles, parcourir un niveau sans sauter, sans toucher aucune pièce, les yeux bandés, dans une camisole au fond d’une rivière. Parce que c’est drôle, parce que ce n’est pas prévu et que ça nous occupe agréablement. On pense très fort au glitch du champignon 1Up.
On pourrait aussi vous parler de Twitch Plays Pokemon si vous insistez. Rien n’émerge du jeu en lui-même mais on touche ici au domaine du sacré, de l’expérience chaotique consommée par plusieurs millions de personnes en simultané. La création d’une mythologie dans la mythologie (dont on vous contait les avancées par ici), le côté sociopathelogique du truc, l’émergence d’une structure, d’une organisation dans un jeu dont on connaît le déroulement et l’issue où le moindre pixel franchi est une victoire sur la vie.
On pense aussi à des trucs comme le Nuzlocke Challenge dans Pokémon, les fdp dans DayZ, les gens qu’on a perdu dans EVE Online. Le combat continue, frère.
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