Le nouveau jeu épisodique de Dontnod veut revoir la recette TellTale Games avec l’ajout du voyage temporel.
L’idée générale de Life is Strange se base sur un constat : et si on avait le temps de bien peser le pour et le contre dans des jeux comme The Walking Dead ? En effet, si la recette de Telltale Games (TTG) fonctionne très bien pour forcer le joueur à faire des choix rapides, sous pression, elle peut parfois créer la curiosité de faire l’autre choix, juste pour constater les changements que cela va engendrer.
Malheureusement, dans un TTG, pour faire de nouveaux choix, il faut recommencer une partie entière, raconter une autre histoire. Life is Strange, de son côté propose de revenir à tout moment dans le temps pour changer un choix ou annuler une action. Un pouvoir que Max, timide étudiante en photographie et héroïne du jeu, va utiliser très tôt pour sauver la vie d’une amie d’enfance.
Vous surprenez un élève pointant une arme sur elle et vous cherchez un moyen de l’en empêcher. Au bout d’un moment, le coup va partir. Qu’à cela ne tienne, remontez le temps et recommencez avec les informations que vous avez collectées lors de l’essai précédent. Seul l’environnement de Max est affecté. Les objets qu’elle tient, sa position ou les informations qu’elle a obtenues restent intacts.
Le retour dans le temps se déclenche en enfonçant tout naturellement la gâchette gauche. Une spirale représentant le temps apparaît alors dans le coin de l’écran. Elle représente la chronologie des événements qui sont indiqués par un petit cercle ou une petite croix. En remontant le fil des événements, vous déferez un choix ou une action et pourrez décider de refaire la scène.
Dontnod a ainsi réussi à faire d’une idée difficile à mettre en pratique quelque chose de très intuitif tant à l’écran que dans la logique des énigmes à résoudre. Toutefois, la force du concept ne tient pas seulement dans une succession de puzzle, mais également dans les choix qui se dresseront devant le joueur.
Au fil de l’histoire ou en parlant avec d’autres étudiants, il faudra choisir. Choisir de se laisser croquer par un étudiant en art et de le laisser mettre la photo sur Facebook, choisir de se dénoncer à la place de son amie pour la protéger, choisir de réconforter ou de se moquer de la rivale de l’école qui passe son temps à vous martyriser… Le fait d’avoir le choix laisse le joueur dans un perpétuel questionnement : est-ce que je dois vraiment laisser ce choix comme ça ? Est-ce que je ne vais pas le regretter plus tard ?
Si le côté sous pression de The Walking Dead vous forçait à faire des choix, ils vous permettaient aussi de les assumer plus facilement. « J’ai fait ce choix, car il fallait bien choisir et choisir vite. » Ainsi, le stress devenait à la fois la justification et l’alibi. Dans Life is Strange, rien de tel. Le joueur n’a pas la pression de temps et a tout le temps de la réflexion pour prendre ses décisions.
Est-ce mieux ? Non. Est-ce moins bien ? Non. C’est différent. Chaque choix va montrer une facette différente de ce qu’on pouvait voir dans The Walking Dead qui soulignait ce qui ressortait des décisions impulsives du joueur. Une autre proposition du jeu narratif, dans un autre contexte (plus social, moins apocalyptique) qui a toute sa place dans l’avalanche de jeux TTG que l’on a vu débouler ces derniers mois.
Cependant, ce système de jeu soulève une vraie problématique. J’ai en effet fini l’épisode deux fois. Une première fois en allant en ligne droite, en agissant naturellement. Tartempion me donne rendez-vous là-bas ? Okay, je vais directement là-bas. Après tout, c’est ce que j’aurais fait dans la vraie vie. Et c’est très certainement ce qu’aurait fait Max, l’héroïne, extrêmement timide et mal dans ses pompes.
Mais je l’ai aussi fini une seconde fois. Seulement cette fois, j’ai farfouillé, j’ai parlé avec tout le monde, j’ai eu le comportement d’un Link dans un jeu Zelda qui rentre partout où il peut rentrer et qui casse les vases comme si c’était normal.
Pour résumer, et si je transpose sur la boucle de gameplay, ma deuxième partie ressemble à ça :
En fouillant dans les environnements, je provoque différentes interactions avec les personnages du jeu. Le joueur va ainsi se retrouver face à des choix. Il pourra ensuite choisir, même s’il ne pourra pas être sûr de la façon dont cela va influencer le reste de son aventure. Mais, in fine, il a le choix.
Maintenant, regardez un peu la façon dont j’ai décidé de parcourir ma première partie :
Vous voyez comme je manque une grande partie des interactions dans cette partie ? Le jeu n’aura pas d’autres solutions que de m’attribuer un choix par défaut à ces interactions manquées. Pour l’instant, nous n’en sommes qu’au premier épisode donc cela n’a pas beaucoup d’importance. Mais à l’épisode 4 ou 5, celui qui ne fait « qu’aller à l’essentiel » ne risque-t-il pas de se faire sanctionner par l’histoire ? De plus, je prends ici les deux cas extrêmes, mais quid de celui qui n’a simplement pas vu une interaction ? Choisit-on vraiment si l’on n’a pas conscience qu’il y a un choix ?
Voilà pourquoi je suis extrêmement curieux de connaître le destin de celui qui décide de finir le jeu en ligne droite, en provoquant le moins d’interactions possible. Je pense d’ailleurs que je vais finir le reste des épisodes de cette manière, car je pense que c’est ma façon naturelle de faire les choses, de toute façon. Ainsi, je verrai bien quelle sera l’expérience minimale proposée par Dontnod. Car avec un système de jeu pareil, hors de question que je le recommence.
Pour le moment, l’histoire est bien menée. L’écriture est bonne, les personnages sont intéressants, les doublages sont convaincants, la bande-son est envoûtante et la direction artistique suffisamment habile et intelligente pour dissimuler l’absence d’ambition technique du titre. Nous verrons dans quatre épisodes si Dontnod parviendra à maintenir le niveau jusqu’au bout. Life is Strange possède tous les atouts pour devenir une histoire narrative aussi marquante en 2015 que l’a été The Walking Dead en 2012.
Life is Strange est disponible sur PC, PS3, PS4, Xbox 360 et Xbox One. Un épisode coûte 5 euros, le season pass coûte 20 euros.
L’idée générale de Life is Strange se base sur un constat : et si on avait le temps de bien peser le pour et le contre dans des jeux comme The Walking Dead ? En effet, si la recette de Telltale Games (TTG) fonctionne très bien pour forcer le joueur à faire des choix rapides, sous pression, elle peut parfois créer la curiosité de faire l’autre choix, juste pour constater les changements que cela va engendrer.
Malheureusement, dans un TTG, pour faire de nouveaux choix, il faut recommencer une partie entière, raconter une autre histoire. Life is Strange, de son côté propose de revenir à tout moment dans le temps pour changer un choix ou annuler une action. Un pouvoir que Max, timide étudiante en photographie et héroïne du jeu, va utiliser très tôt pour sauver la vie d’une amie d’enfance.
Vous surprenez un élève pointant une arme sur elle et vous cherchez un moyen de l’en empêcher. Au bout d’un moment, le coup va partir. Qu’à cela ne tienne, remontez le temps et recommencez avec les informations que vous avez collectées lors de l’essai précédent. Seul l’environnement de Max est affecté. Les objets qu’elle tient, sa position ou les informations qu’elle a obtenues restent intacts.
Le retour dans le temps se déclenche en enfonçant tout naturellement la gâchette gauche. Une spirale représentant le temps apparaît alors dans le coin de l’écran. Elle représente la chronologie des événements qui sont indiqués par un petit cercle ou une petite croix. En remontant le fil des événements, vous déferez un choix ou une action et pourrez décider de refaire la scène.
Dontnod a ainsi réussi à faire d’une idée difficile à mettre en pratique quelque chose de très intuitif tant à l’écran que dans la logique des énigmes à résoudre. Toutefois, la force du concept ne tient pas seulement dans une succession de puzzle, mais également dans les choix qui se dresseront devant le joueur.
Au fil de l’histoire ou en parlant avec d’autres étudiants, il faudra choisir. Choisir de se laisser croquer par un étudiant en art et de le laisser mettre la photo sur Facebook, choisir de se dénoncer à la place de son amie pour la protéger, choisir de réconforter ou de se moquer de la rivale de l’école qui passe son temps à vous martyriser… Le fait d’avoir le choix laisse le joueur dans un perpétuel questionnement : est-ce que je dois vraiment laisser ce choix comme ça ? Est-ce que je ne vais pas le regretter plus tard ?
Si le côté sous pression de The Walking Dead vous forçait à faire des choix, ils vous permettaient aussi de les assumer plus facilement. « J’ai fait ce choix, car il fallait bien choisir et choisir vite. » Ainsi, le stress devenait à la fois la justification et l’alibi. Dans Life is Strange, rien de tel. Le joueur n’a pas la pression de temps et a tout le temps de la réflexion pour prendre ses décisions.
Est-ce mieux ? Non. Est-ce moins bien ? Non. C’est différent. Chaque choix va montrer une facette différente de ce qu’on pouvait voir dans The Walking Dead qui soulignait ce qui ressortait des décisions impulsives du joueur. Une autre proposition du jeu narratif, dans un autre contexte (plus social, moins apocalyptique) qui a toute sa place dans l’avalanche de jeux TTG que l’on a vu débouler ces derniers mois.
Cependant, ce système de jeu soulève une vraie problématique. J’ai en effet fini l’épisode deux fois. Une première fois en allant en ligne droite, en agissant naturellement. Tartempion me donne rendez-vous là-bas ? Okay, je vais directement là-bas. Après tout, c’est ce que j’aurais fait dans la vraie vie. Et c’est très certainement ce qu’aurait fait Max, l’héroïne, extrêmement timide et mal dans ses pompes.
Mais je l’ai aussi fini une seconde fois. Seulement cette fois, j’ai farfouillé, j’ai parlé avec tout le monde, j’ai eu le comportement d’un Link dans un jeu Zelda qui rentre partout où il peut rentrer et qui casse les vases comme si c’était normal.
Pour résumer, et si je transpose sur la boucle de gameplay, ma deuxième partie ressemble à ça :
En fouillant dans les environnements, je provoque différentes interactions avec les personnages du jeu. Le joueur va ainsi se retrouver face à des choix. Il pourra ensuite choisir, même s’il ne pourra pas être sûr de la façon dont cela va influencer le reste de son aventure. Mais, in fine, il a le choix.
Maintenant, regardez un peu la façon dont j’ai décidé de parcourir ma première partie :
Vous voyez comme je manque une grande partie des interactions dans cette partie ? Le jeu n’aura pas d’autres solutions que de m’attribuer un choix par défaut à ces interactions manquées. Pour l’instant, nous n’en sommes qu’au premier épisode donc cela n’a pas beaucoup d’importance. Mais à l’épisode 4 ou 5, celui qui ne fait « qu’aller à l’essentiel » ne risque-t-il pas de se faire sanctionner par l’histoire ? De plus, je prends ici les deux cas extrêmes, mais quid de celui qui n’a simplement pas vu une interaction ? Choisit-on vraiment si l’on n’a pas conscience qu’il y a un choix ?
Voilà pourquoi je suis extrêmement curieux de connaître le destin de celui qui décide de finir le jeu en ligne droite, en provoquant le moins d’interactions possible. Je pense d’ailleurs que je vais finir le reste des épisodes de cette manière, car je pense que c’est ma façon naturelle de faire les choses, de toute façon. Ainsi, je verrai bien quelle sera l’expérience minimale proposée par Dontnod. Car avec un système de jeu pareil, hors de question que je le recommence.
Pour le moment, l’histoire est bien menée. L’écriture est bonne, les personnages sont intéressants, les doublages sont convaincants, la bande-son est envoûtante et la direction artistique suffisamment habile et intelligente pour dissimuler l’absence d’ambition technique du titre. Nous verrons dans quatre épisodes si Dontnod parviendra à maintenir le niveau jusqu’au bout. Life is Strange possède tous les atouts pour devenir une histoire narrative aussi marquante en 2015 que l’a été The Walking Dead en 2012.
Life is Strange est disponible sur PC, PS3, PS4, Xbox 360 et Xbox One. Un épisode coûte 5 euros, le season pass coûte 20 euros.
🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.