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Loi antiterroriste adoptée : défenseurs des libertés et géants du web s’indignent

Après moult débats et des allers-retours entre l’Assemblée Nationale et le Sénat, le projet de loi de « lutte contre le terrorisme » a été définitivement…

Après moult débats et des allers-retours entre l’Assemblée Nationale et le Sénat, le projet de loi de « lutte contre le terrorisme » a été définitivement adopté le 4 novembre par le Sénat. Son volet consacré à Internet inquiète les défenseurs du web.

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C’est à la quasi-unanimité que le controversé projet de loi de lutte contre le terrorisme a été adopté par le Parlement. Dans sa partie dédiée au web, l’article 9 du texte présenté par le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, prévoit le blocage administratif des sites faisant l’apologie du terrorisme par les FAI. Ce blocage sera décidé par l’exécutif sans faire appel à un juge. Dans le même temps, ce texte prévoit d’offrir aux forces de police la possibilité de déréférencer du contenu faisant l’apologie du terrorisme. Une apologie du terrorisme qui n’a pas de définition légale précise, un pouvoir discrétionnaire potentiellement dangereux.

Déjà, le chef des Verts à l’Assemblée, François de Rugy, doute de l’efficacité de cette mesure et prévient que « le texte n’encadre pas suffisamment les pouvoirs nouveaux qu’il met à disposition de l’administration ». Les écologistes se sont d’ailleurs abstenus lors du vote.
Du côté de l’UMP, l’avis est évidemment tout autre : le député Philippe Goujon a jugé que « l’urgence sécuritaire commande d’adopter sans délai ce projet de loi ». Malgré des « réserves », le Front de Gauche estime quant à lui que ce projet de loi réussit « cet équilibre délicat entre efficacité et respect des libertés fondamentales ».

Urgence sécuritaire en France, sécurité nationale aux États-Unis. La sécurité est mère de toutes les lois privatives et coercitives donc, mais comme il en va de l’intérêt général

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Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur

Outre cet aspect, les spécialistes du numérique présents à l’Assemblée ont surtout pointé l’invraisemblance de l’article 9 qui prône le filtrage par serveur de nom de domaine (DNS). Technique qui est facilement contournable par les administrateurs des sites incriminés.

Dans les rangs du PS, certains députés n’ont pas hésité à contredire leur ministre, dont Corinne Erhel (rapporteure pour avis sur les crédits « communications électroniques et numérique » de la mission « Economie ») qui a rappelé que pléthore d’experts ont critiqué ce mode de filtrage : le Conseil national du numérique, la Commission (de l’Assemblée nationale) sur les droits et libertés numériques, le directeur de l’Agence nationale de cyberdéfense (ANSSI) mais aussi des experts en sécurité et des acteurs du numérique dont la Quadrature du Net.

“Cette méthode a des effets secondaires infiniment plus graves que les effets attendus, qui n’auront pas lieu. Je ne veux pas que la représentation nationale se ridiculise par méconnaissance technique”, a pour sa part tempêté Isabelle Attard, député de Nouvelle donne, apparentée écologiste.

Il est vrai que quitte à censurer le web autant le faire correctement et ne pas passer pour des… amateurs. Las, le ministre n’a pas écouté les supplications des députés.

Par ailleurs, le député UMP Lionel Tardy n’a pas hésité à dresser un parallèle entre les dérives engendrées par cette loi et les pratiques de la NSA : « Faut-il faire reculer encore la liberté, contre le terrorisme ?» et d’ajouter comme un sombre présage, « la France s’engage à petits pas dans la direction de la NSA ». Il n’a pas manqué de rappeler au ministre de l’Intérieur ainsi qu’au groupe PS qu’ils avaient voté contre cette loi proposée par l’UMP en 2010. De la contradiction en politique, acte XXVII, scène 42.

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Les géants du web ont immédiatement réagit suite à ce vote. L’Asic (Association des sites internet communautaires), qui regroupe notamment Google, Skype, Facebook, Microsoft, Yahoo!, Dailymotion, eBay, Deezer, Spotify, Airbnb, PriceMinister ou encore AOL, souhaite que le Conseil Constitutionnel soit saisi et examine cette loi qui constitue « une atteinte sans précédent aux libertés ».
L’Asic dénonce dans un communiqué (ici en .pdf), « l’extension grandissante des pouvoirs offerts aux services de police et aux services de renseignements en matière de contrôle des contenus et des comportements sur internet sans supervision de l’autorité judiciaire ». Elle rappelle également que la CNCDH et la nouvelle Commission Libertés numériques de l’Assemblée nationale ont elles aussi exprimé leurs craintes.

Le Conseil Constitutionnel constitue donc pour l’Asic l’ultime recours : « par le passé, le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de rappeler la nécessité de limiter les atteintes à la liberté de communication. Celle-ci inclut notamment la liberté d’accéder à des informations. Le blocage de sites internet, tout comme leur déréférencement, constitue par nature une atteinte à cette liberté. »

La mesure phare de ce projet de loi reste l’interdiction administrative de sortie du territoire en cas de « raisons sérieuses de croire » que la personne « projette des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes » ou « sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes » et qui vise spécifiquement les départs pour le djihad depuis le début de la guerre en Syrie et le recrutement forcené de l’EI sur les plateformes web. On ne peut s’empêcher de penser qu’encore une fois le contexte fait la loi. Comment la propagande djihadiste sur internet, dans le contexte actuel, n’a pas servi de caisse de résonance au moment de voter cette loi ?

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Et il n’y a pas qu’en France où la menace terroriste fait le lit des agences de renseignement et des gouvernements. Le FBI agite le spectre du 11 septembre et cette nouvelle forme de terrorisme pro réseaux sociaux pour imposer des backdoors légales à Apple et Google :

Le chiffrement n’est pas seulement une fonction technique, c’est un argument marketing. Mais il aura des conséquences très graves pour l’application de la loi et les agences de sécurité nationale à tous les niveaux. Les criminels sophistiqués compteront sur ces moyens pour échapper à toute détection. C’est l’équivalent d’un placard qui ne peut pas être ouvert. Un coffre-fort qui ne peut pas être ouvert. Un coffre-fort qui ne peut jamais être fissuré. Et ma question est, à quel prix ?

Le GCHQ quant à lui accuse les géants du web et particulièrement les réseaux sociaux de fournir aux terrorismes et criminels de tous bords un « centre de commandement », il les enjoint donc à plus de coopération :

Le défi posé aux gouvernements et à leurs agences de renseignement est gigantesque, et ne peut être relevé que par une meilleure coopération de la part des entreprises de haute technologie.
Relever ce défi passera par des mécanismes facilitant les enquêtes légales menées par les agences de sécurité et de maintien de l’ordre meilleurs que ceux qui existent actuellement.

Selon son directeur, cela passera par une « nouvelle donne » entre « les gouvernements démocratiques et les entreprises technologiques pour protéger les citoyens, qui doit être enracinée dans nos valeurs démocratiques communes ».

C’est donc une question de démocratie…

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23 commentaires
  1. “Ce blocage sera décidé par l’exécutif sans faire appel à un juge.”
    Bon bah voilà où on en est…
    RIP la séparation des pouvoirs exécutif/judiciaire…. sacrifiée sur l’autel de la sécurité.
    Je suis le seul à trouver que plus ça va et plus nos libertés prennent cher? :/

  2. une seule phrase resume tout :”je ne veux pas que la représentation nationale se ridiculise par méconnaissance technique”
    et c’est bien la tout le probleme… que ce soit le senat ou l’assemblee nationale…. ils sont tout deux incompetent en matiere de nouvelles tech….

  3. “Il n’a pas manqué de rappeler au ministre de l’Intérieur ainsi qu’au groupe PS qu’ils avaient voté contre cette loi proposée par l’UMP en 2010. De la contradiction en politique, acte XXVII, scène 42.”

    Ca me fatigue franchement, la politique est tellement merdique, et ils n’en ont absolument pas honte. En 2010 ca faisait “bien” de voter contre une loi liberticide, en 2014 par contre, un coup de sifflet du gouvernement et ils retournent tous leurs vestes pour voter pour. Ca me fait vomir.

  4. Si on prend un peu de recul, et mon idée n’est vraiment pas de défendre un article que je ne connais pas :
    – le gournevement aborde un sujet qu’il ne connaît/maîtrise pas
    – l’opposition critique et ne propose rien (je parle de l’UMP, mais si les rôles avaient été inversés, je sais que mon discours aurait été le même)
    – qui a vraiment lu la loi en question ici, et pas par ce que d’autres en ont dit ? En dehors des journalistes JDG bien sûr 😉 *ahem*
    – c’est un sujet qu’il faut aborder. Si on constate des dérives dangereuses, pourquoi les laisser faire ? Mais il faut de vrais experts pour faire les propositions adéquates…
    En bref, on est toujours à la même situation : la critique aveugle de ceux qui ne voient que les dérives, des romans écrits par des politiques pour développer une simple idée (ok, c’est quand même le principe de la démocratie de discuter), des sujets qui avancent mal… Au final, on râle pour quelque chose qu’on connaît déjà, et pour laquelle on sait tous que les moyens de contourner fleuriront pour les gens qui trempent dedans.

  5. Je vous rappel que Tor est dispo gratuitement, je l’ai téléchargé mais pas encore installé.
    Si les politiques veulent nous poussez vers le Deep Web, je le ferais.

  6. +1 pour tout ce qui a été dit et :

    “La mesure phare de ce projet de loi reste l’interdiction administrative de sortie du territoire en cas de « raisons sérieuses de croire » que la personne « projette des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes »”

    Moi je serai plutôt pour les empêcher de revenir plutot que les empêcher de partir …

  7. flamenkish: Le réseau Tor est utilisé par la NSA…
    Il faudrait plutôt utiliser un système vpn+vps voir un noeud de proxy fait maison pour essayer de passer outre la surveillance.

  8. notons que encore une fois les verts sont ouvertement contre mais décident de s’abstenir au lieu de voter contre. Encore et toujours les verts préfèrent s’en tenir a leurs petits arrangements entre amis plutôt que de respecter leurs convictions.

  9. A terme, il y aura le bannissement de certaines phrases sur le web écrit ou parlé…
    On en est pas loin de toute façon…..Microsoft a lancé une bêta qui permet la traduction directe d’une visio skype dans 2 langues parlées et non comprises par l’un ou l’autre interlocuteur…
    Une phrase écrite, peut importe la langue, se verra automatiquement effacée en passant par le web et ce sera aussi possible via la voix avec le tout IP qui approche….
    C’est pas plus mal…..Plus de propagande x-y qui vont en l’encontre d’une LOIS INTERNATIONALE qui reste encore à définir. 😉

  10. Mais vous croyez quoi ? Vous croyez qu’avec cette loi ils vont interdire vos sites pornos pour contenu terroristes ?
    Peut-être qu’il n’y a pas de juges mais ça n’empêche pas qu’ils n’ont pas de raison et pas que ça à foutre que d’interdire les contenus non terroristes avec cette loi… Quel serait leur prétexte ?
    “Je ban votre site de shopping parce que vous vendez des voiles terroristes” ?
    C’est typiquement français de râler pour un tout et un rien… Vous allez faire la révolution ou la grève pour ça ?

  11. Un mot sur l’article lui-même. J’aime la langue française, et connais un peu de droit. Je lis l’article d’Elodie et je suis officiellement amoureux. J’ai rarement lu, non pas dans le JDG mais dans la presse en général, un article aussi bien écrit sur la forme qu’aussi exact au plan du droit. Vraiment, c’est suffisamment rare pour être impressionnant et si les articles de cette qualité pouvaient se multiplier sur ce site, je pense que cela donnerait au JDG une autorité et une crédibilité assez exceptionnelles sur ces questions.

    Quant au sujet en lui-même, il faut espérer qu’effectivement le Conseil Constitutionnel censurera. De la prévention du terrorisme au contrôle administratif des bonnes mœurs, il n’y a qu’un pas.

    Le danger est que le contrôle a posteriori que constituerait le référé liberté devant le juge administratif, lequel référé doit se juger en vingt-quatre heures, paraisse suffisant audit Conseil constitutionnel pour qu’il estime que nos libertés publiques sont garanties et que l’analogie soit faite avec la possibilité pour le ministre d’interdire la parution de certaines revues dans l’exercice de son pouvoir de police administrative, donc avant que le juge n’intervienne, conformément à l’article 14 de la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949.

  12. On est bel et bien dans une bureaucratie (et une ploutocratie. Mais, ici, on prouve bien que l’on est dans une bureaucratie) ! Sinon, ce n’est pas notre cher Etat qui critique la Chine et la Russie, car ce sont des pays liberticides ? Je ne dis pas cela pour les défendre (l’Europe n’est pas à défendre non plus) ! J’ai de plus en plus l’impression que le film Captain America le soldat de l’hiver nous montre bel et bien ce que l’on fait : on supprime nos libertés, pour pouvoir être en sécurité (futur totalitarisme ?) ! Ces mêmes libertés, que l’on croyait défendre à une autre époque…

  13. Aaaaaah la sécurité. et le bon peuple croit que ça va le protéger contre les méchants terroriste de réduire sa liberté

    Benjamin Franklin a dit : “Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux.”

  14. Je ne vois ou est le problème. De toute façon à chaque fois que le pays tente de faire quelque chose pour enrayer les cinglés, y a toujours les bobos qui pleurent pour leur liberté. Mais qu’en font-ils de leur liberté ? Si ils n’entrent pas dans la cadre répressif de cette loi on va pas leur interdire de parler de leur pu** de chat ou de faire des selfies. Avez vous vu dans votre quotidien depuis 10 ans vos libertés s’amoindrir sur le net ?

  15. @pastabox je vais essayer de répondre sans tomber dans le troll…
    La question n’est pas lse 10 années qui sont passées. Le gouvernement ne savait presque pas ce qu’est internet, c’est seulement maintenant qu’ils s’y intéressent.
    Et quand on parle de backdoors “légales” –et je vais parler du point de vue mathématique et informatique– ça n’a pas de sens dans le monde de la sécurité. Et la sécurité c’est non seulement pouvoir avoir ses données privées, mais aussi éviter qu’on ne se retrouve dans 1984.
    Tu vas me répondre que j’exagère, eh bien peut-être…pas. Je ne suis pas très bon à expliquer, et encore moins à l’écrit, mais que le gouvernement — ou des services secrets — aient accès à nos données personnelles, ça veut dire que QUELQU’UN y a accès… Et alors N’IMPORTE QUI. Par quelque chemin que ce soit.

    Bon passons à la censure maintenant… Tiens, le mot tout seul fait un peu plus peur que “censure du terrorisme”. Et c’est bien la “censure” qui est légalisée, que ce soit du terrorisme ou non. Parce que ne pas passer par un juge, c’est laisser un bureaucrate décider ce qui doit être censuré. Et c’est laisser un gouvernement, aussi, décider que le forum un peu trop intéressant, avec des gens un peu trop intelligents, est un forum de “terrorisme”.
    On a déjà eu des exemples de débordements, et le pire c’est qu’ils seront désormais légalisés.

  16. Juste pour dire, la censure était déjà présente avant que le texte soit adopté,

    combien de compte twitter / youtube / facebook / justpast affilié à l’EI ont été fermé ? enormément.

    A chaque nouvelle parution de contenu de l’EI c’est une course contre la montre avant sa censure.

    Alors que dans le même temps des vidéos de frappes alliés et de peshmergas posants à côté de jihadistes tués ne sont pas censurés

  17. Qu’ils mettent des gens qui connaissent vraiment le web pour voter des lois sur internet et pas des gros cochons pleins de fric qui pensent qu’Internet se résume à Youporn, Facebook et djihad.com et là on avancera. Un bon point pour les verts sur ce coup là

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