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Gouvernance et extensions .vin, Axelle Lemaire pose un ultimatum à l’ICANN

Cette semaine, l’ICANN – bientôt libérée de la tutelle américaine – est à Londres pour réfléchir à son devenir dont l’enjeu n’est rien de moins que…

Cette semaine, l’ICANN – bientôt libérée de la tutelle américaine – est à Londres pour réfléchir à son devenir dont l’enjeu n’est rien de moins que la gouvernance du Net. Quel type de gouvernance adopter, quel poids doit-on conférer aux États ? À peine lancée, cette réunion au sommet s’annonce des plus tendues, les premières divergences apparaissent et un ultimatum a été posé par Axelle Lemaire autour des extensions .vin ou .wine. Explications.

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Le net est en pleine mutation. Le 14 mars, Washington a annoncé qu’il allait progressivement abandonner sa mainmise sur l’ICANN, celle-ci prône désormais « indépendance et internationalisation » ; la neutralité du net est remise en question aux États-Unis, en France, l’arrivée de Netflix donne des envies similaires à Canal+ ; et la gouvernance du Net est la prochaine bataille politique annoncée.

Créée en 1998, sous tutelle du Département du Commerce américain, l’ICANN (Internet Corportation for Assigned Names and Numbers) est chargée de l’attribution des noms de domaines tels que .com .fr . gouv, récemment .paris et bientôt (ou depuis peu) .bzh. Son siège étant en Californie, l’institution dépend, pour quelque temps encore (jusqu’en septembre 2015), du droit californien en vigueur.

Plus de 2000 participants sont attendus à Londres pour discuter de l’avenir d’Internet dans le cadre du 50e sommet de l’ICANN. À l’ordre du jour : gouvernance et nom de domaine. Mais déjà, les premières divergences apparaissent.

Sur la gouvernance du Net, les États-Unis, dont les tensions avec la Russie se sont accrues, met en garde contre certains pays peu respectueux des libertés sur Internet qui verraient là l’aubaine d’exercer un contrôle sur tout ce qui régit l’internet mondial. Avec pour enjeu majeur : censure, surveillance des internautes, espionnage économique, poids diplomatique, etc.
Néanmoins, depuis l’affaire NSA/Snowden, la parole des États-Unis quelque peu sujette à caution.

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AFP – Joel SAGET

La position de la France – qui rejoint celles de plusieurs pays Européens, via la secrétaire d’État au Numérique, est connue depuis plusieurs mois. En effet, peu après sa prise de fonction, dans une interview accordée au Point, Axelle Lemaire s’était prononcée pour une neutralité du net « clairement affirmée » (une récente entrevue avec Neelie Kroes, commissaire européenne en charge de la politique numérique de l’Union, laissait craindre un revirement de position) et une gouvernance « multi-acteurs » ou « multipartite ».

Nous soutenons le modèle multi-acteurs qui associe gouvernements, entreprises et société civile […] il est essentiel de renforcer le rôle des gouvernements démocratiquement élus sur certains sujets.

Par ailleurs, elle s’était également exprimée sur un autre sujet sensible, l’extension .vin et .wine. Elle considérait alors qu’une approche « exclusivement commerciale des questions qui relèvent aussi de l’appartenance nationale et culturelle constitue une dérive, nuit gravement à nos producteurs et remet en cause un acquis communautaire important pour les échanges internationaux. Sur ce sujet, je pense que l’ICANN ne doit pas éviter, par l’édiction de mesures techniques, les nécessaires discussions politiques multilatérales. »

Cependant, dans son objectif d’ouverture et d’internationalisation, l’ICANN s’attire les foudres de la France et de l’Europe dans sa volonté d’attribuer l’extension .vin au groupe américain Donuts pour 8 millions d’euros. Ce dernier n’aurait aucunement l’intention de faire respecter les indications géographiques. Autrement dit, le nom de domaine chardonnay.vin, ou champagne.wine pourrait être vendu au plus offrant et ainsi tromper les consommateurs qui pensent acheter un vin AOC, ce qui provoque l’inquiétude chez nombre de viticulteurs français et européens, comme le souligne Le Figaro.

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Axelle Lemaire n’en démords pas : le 18 juin, dans un courrier adressé au Conseil de l’ICANN celle-ci fait part de sa vive inquiétude :

“Le nouveau programme gTLD ne tient pas compte d’importantes questions de politique publique de l’UE.[…] Je demeure profondément préoccupée par la potentielle tromperie concernant les indications géographiques protégées que la délégation proposée de ces deux TLD peut entraîner, maintenant qu’il semble que la désignation suive son cours sans que les garanties appropriées aient été mises en place.” Ajoutant que « l’incapacité de l’ICANN à tenir compte de l’intérêt public mine la confiance dans l’organisation ».

L’ICANN n’en a cure et a préféré refiler la patate chaude à l’OMC. Cependant, Axelle Lemaire, épaulée par Laurent Fabius et Stéphane LeFoll, respectivement ministre des Affaires Etrangères et ministre de l’Agriculture, ne compte pas s’en laisser compter. Dans une lettre co-signée par les trois représentants de la France et adressée à Bruxelles, ils y soulignent que ce sujet « menace de devenir un cas emblématique des dérives du système actuel de la gouvernance d’Internet ».

La secrétaire d’État au Numérique a d’ores et déjà posé un ultimatum : si l’ICANN reste inflexible dans sa démarche, la France ne participera pas au processus de réforme de l’organisme.

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7 commentaires
  1. “Créée en 1998, sous tutelle du Département du Commerde américain,”

    Lapsus révélateur 😀 on savait que les États-Unis pouvaient faire une com de merde mais de là à avoir un département consacré à ça…

  2. Euh… je crois qu’il y a une jolie faute de frappe dans l’article : “le Département du Commerde Américain”. Bon OK les touches sont proches…

    Faut corriger vite sinon ça va être la merce dans les commentaires;

    Merdi!

  3. Comment-ça ? On n’a pas le droit d’utiliser le nom d’un AOC pour autre chose que le produit protégé (cf. Apple qui ne peut pas vendre d’iPhone couleur champagne, mais un iPhone couleur or), mais un type avec des sous pourrait l’utiliser comme nom de domaine ?

  4. @Tatouille : Oui c’est ça. Multiplier les extensions de domaine, c’est multiplier autant les abus du système.

    Un exemple d’abus déjà en place : des boites de marketing ont achetés tout les noms de domaine correspondant aux noms des communes françaises. Si la commune veut faire développer son site, elle a alors le choix de se tourner de force vers se prestataire ou bien de leur racheter le nom de domaine avec un belle plus-value pour le dealer.

  5. “Je suis pour la neutralité du net mais moi Etat Francais je ne veux pas qu’une extension ne soit donné a quelqu’un d’autre que ce que moi Etat je veux”… C’est çà ?
    C’est comme si l’extension “.car” se lancait, qui aurait le droit de la prendre, selon elle ? Le syndicat des bus francais ou bien le syndicat des fabricant de voiture américaine ? Et des exemples comme çà il y en a foison.. donc non, la neutralité du net passe d’abord et en premier par l’interdiction des états a décider l’attribution de domaines, ou l’attribution d’extension. Car justement c’est le coeur de la neutralité du net, si un état peut décider quelle extension peut exister, quel domaine peut exister, c’est le début de la censure et le début du controle par des autorité étatiques d’un domaine qui les concerne pas.
    Alors c’est triste que cela soit l’argent qui controle, mais on ne peut pas se dire “pour la neutralité du net” et prouvé le contraire dans ces actes et l’histoire nous le dit, le danger vient rarement des entreprises privées mais des pouvoirs politiques.

  6. Bon et de toute facon quand on voit qu’aujourd’hui, seul le .com, .net et .pays est prioritairement reconnu par Google, que les .eu, les .name,… sont totalement absent on ne voit pas trop a quoi vont servir ces domaines… a part a jouer sur le célebre “prend le ou sinon tu vas te le faire prendre et on sait jamais”… comme Paris qui a pris l’extension .paris, mais que personne ne va jamais tappé et que les moteurs ne reconnaitront de toute facon pas. Bref une enfumisterie pour faire en sorte que des Etats, des Villes, des Entreprises,… payent des centaines de milliers d’euros pour en acquérir un et ainsi mettre de l’argent dans les caisses… On appel ca un attrape couillon je crois.

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