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[Remember Me] Entretien avec Oskar Guilbert, patron de DONTNOD (première partie)

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À l’occasion de notre passage dans les locaux de DONTNOD, en charge du prometteur Remember Me, nous nous sommes entretenus avec le loquace et très agréable…

À l’occasion de notre passage dans les locaux de DONTNOD, en charge du prometteur Remember Me, nous nous sommes entretenus avec le loquace et très agréable Oskar Guilbert, Directeur général du studio parisien. Nous avons divisé cet entretien en deux parties. La première est consacrée au studio et à l’industrie. La seconde, qui sera mise en ligne demain, se centrera, elle, sur la narration et le personnage de Nilin.

Oskar Guilbert - CEO

En cinq ans, vous êtes passé d’un groupe d’amis qui veulent travailler ensemble, à un beau et grand studio. Quelles sont les conditions qui expliquent que vous êtes devenu un studio français dont on parle beaucoup aujourd’hui ?

O.G. : Oui. Au début on était cinq fondateurs, je vais même dire cinq amis qui se réunissaient une fois par semaine au restaurant et qui rêvaient de faire un super jeu au sein d’une boite à taille humaine, où les gens trouvent du plaisir à travailler. On revenait tous d’expériences chez des éditeurs, grands ou petits. L’idée, c’était de faire notre jeu tel que nous on voulait le faire.

Donc au départ, vraiment, un rêve. Mais un rêve que l’on allait essayer de faire vivre avec des gens qui étaient tous très doués, ça, je pense que c’est une condition. Ensuite, et ça nous a beaucoup aidés, on avait aussi une idée de technologie de simulation de fluide – technologie que finalement on a assez peu utilisé dans le jeu. Grâce à cette technologie, on a pu décrocher Les Grands prix de l’Innovation en 2008. C’est un concours qui est ouvert chaque année à toutes les entreprises qui se créent et qui ont quelque chose d’innovant à proposer. C’est une grosse sélection, ce n’est pas tellement que ça draine beaucoup d’argent ou que ça permet de démarrer sa société… je crois que c’était, dans les catégories « Emergence », 30 000 euros ou 40 000 euros… mais ça permet de sélectionner. Il y a 1000 entreprises qui candidatent, 100 sont présélectionnées et cinq touchent le maximum de la subvention. On était super contents. On a ensuite pu montrer ça à des investisseurs, des business angel, qui ont cru en nous et qui ont mis l’argent nécessaire pour qu’on puisse développer un proto. Si j’avais un conseil à donner aux jeunes créateurs de studio d’ailleurs, c’est peut-être de commencer par ça, de se faire sélectionner dans un concours, assez visible et assez large, pour attaquer derrière des financiers privés, qui eux mettront un peu d’argent dans le projet. La suite c’est, séduire les éditeurs.

Justement, séduire les éditeurs sans jamais trahir son propos, n’est-ce pas un problème insoluble ?

O.G. : Il faut que ton idée plaise à l’éditeur, bien entendu, sinon il ne travaille pas avec toi, il va travailler avec quelqu’un d’autre. Mais les éléments qui peuvent rentrer en ligne de compte – la finance mondiale, le marché du jeu vidéo – et faire que ton jeu réussit, ou pas, sont nombreux et imprévisibles. Y a un côté timing, un côté chance. Tu peux par exemple te retrouver à signer avec un éditeur, et quelques mois après, toute son équipe dirigeante change et tu dois alors le convaincre à nouveau que ton projet vaut le coup. Et puis c’est long, c’est cinq ans de développement. Ces situations arrivent tout le temps ! Dans ce métier, il faut aimer les hauts et les bas.

Il y a eu quand même des moments où on était vraiment au fond et où on se disait : « Ça y est, demain c’est fini. » Et puis hop, même en quelques jours, sans trop comprendre tu peux repartir ! Quand on a signé avec Capcom, on s’est séparé de Sony et il fallait que Capcom récupère toutes les éléments qui leur appartenaient. Ce n’était pas gagné d’avance, Capcom devait nous faire extrêmement confiance sur le fait qu’on allait pouvoir tout reprendre, et terminer ce jeu. Mais ça aurait pu ne pas se faire, vraiment, plusieurs fois.

Comment ça se passe après la sortie, le 7 juin ? Il faut que ça marche pour que vous sortiez autre chose ?

O.G. : C’est un peu ça oui. C’est-à-dire que, nous, notre but pour la société DONTNOD, c’était de se dire : « Est-ce qu’on est capable de faire un bon jeu ? Est-ce qu’on est capable de faire un triple A, bien reçu par la presse, soutenu par un gros éditeur mondial comme Capcom ? » Aujourd’hui, je pense qu’on est à l’objectif, et c’était crucial pour nous. Après, que les ventes soient bonnes ou pas, c’est bien entendu très important pour notre relation avec Capcom. D’un point de vue plus global, ça l’est un peu moins, on peut toujours signer un jeu avec un autre éditeur. Mais je répète qu’on a déjà gagné notre pari puisqu’en partant de rien ou presque, on est arrivé à faire un blockbuster qui sera commercialisé dans le monde entier.

Là, vous avez pris 5 ans pour faire naître Remember Me, développer votre société, etc. On imagine que le cycle de développement du jeu suivant va être beaucoup plus court. Est-ce que vous n’avez pas peur de perdre toute cette énergie, cette créativité que vous avez mis dans ce premier projet. N’est-il pas là, maintenant, le véritable enjeu pour vous ?

O.G. : Tu peux appréhender cette problématique de plusieurs façons. Parce que cinq ans c’est fatiguant, il faut tout de même pas le nier, on a tous eu des coups de barre pendant ces cinq ans. Mais l’idée c’est de se dire… voilà, moi j’ai passé la quarantaine, d’autres l’ont passée aussi, mais on a des jeunes qui sont là derrière nous, qui ont appris avec nous et qui vont maintenant eux aussi initier leur projet. Nous, on en a fait un, mais il y en a d’autres derrière qui vont mettre de la créa’ et qui pourront proposer d’autres IP, avec une motivation très forte autour de ça. Profitons de l’équipe, on a aujourd’hui en interne 70 personnes, profitons de leur savoir-faire pour pouvoir lancer la suite !

Notre preview toute fraiche de Remember Me.

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